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WAI Massy-Saclay, 3 ans déjà !

Le 3 novembre 2018

Le 9 octobre 2018, le WAI Massy-Saclay soufflait sa 3e bougie. En voici un premier écho à travers le témoignage de son directeur.

– Nous vous avions interviewé une première fois lors du lancement du WAI Massy-Saclay [pour accéder à cet entretien, cliquer ici]. Que de chemin parcouru depuis ! Mais cela a-t-il été un chemin de croix ou le projet a-t-il, au contraire, « pris » d’emblée, témoignant ainsi du fait qu’il était dans un écosystème fertile ?

(Sourire) Sans aller jusqu’à parler de chemin de croix, je dirai que nous avons dû opérer des « pivots ». Le principal a concerné notre positionnement vis-à-vis des start-up. Au début, notre intention était de les aider à se connecter aux ETI dans une logique d’accélération. Or, force est de constater que si l’écosystème compte plusieurs grands groupes et un riche tissu de PME-TPE, en revanche, ces entreprises de taille intermédiaire y sont relativement moins nombreuses. Une réalité à laquelle nous nous sommes donc adaptés en rapprochant davantage les start-up des grands comptes. Un deuxième pivot, lié au précédent, a consisté à accueillir des projets dès leur phase d’idéation, dans une logique d’incubation. Aujourd’hui, nous accompagnons une quinzaine de start-up à fort potentiel, de la phase d’amorçage jusqu’à la phase d’accélération. Une particularité de WAI Massy-Saclay par rapport à d’autres tiers-lieux dédiés soit à l’incubation soit à l’accélération.

– « Pivot » avez-vous dit. Est-ce à dire que le WAI fonctionne comme une start-up ?

Oui, bien sûr, même si c’est aux startuppers que revient le mérite de prendre le plus de risque. Mais il est clair que nous nous devons de parler le même langage et être en mesure de comprendre les problématiques inhérentes à la démarche de l’entrepreneur innovant.

– Pouvez-vous mettre en exergue des start-up que vous accueillez actuellement ?

C’est difficile tant elles méritent toutes d’être citées ! Maintenant, puisque vous me demander de donner des exemples, je mettrais en avant SpotLight, qui illustre bien le second pivot que j’évoquais tout à l’heure. Habib Al Khatib, son fondateur, était venu me voir huit mois avant la création de sa société. Il travaillait alors à la CGG [anciennement Compagnie Générale de Géophysique-Veritas], dont les locaux sont à deux pas de là. Avec d’autres, il réfléchissait à un outil de détection visant à optimiser la production d’énergie. Nous les avons, lui et son équipe, accompagnés à partir d’octobre 2016, dans une phase d’amorçage, d’abord. Aujourd’hui, SpotLight est en pleine accélération et a bénéficié d’une réelle reconnaissance – elle a été lauréate du Trophée de l’Innovation Evolen, puis de l’ancien concours ILab Emergence qui délivre désormais la prestigieuse bourse French Tech Emergence.
Autre exemple : Exoneo, qui développe une gamme de prothèses et d’orthèses, basée sur l’étude du mouvement de l’homme, le biomimétisme. Elle a, elle aussi, décroché la bourse French Tech Emergence. Deux exemples qui illustrent, au passage, le large spectre des domaines investis par nos start-up.

– En quoi consiste concrètement votre accompagnement, à partir du moment où des projets intègrent le WAI Massy-Saclay ? Que mettez-vous à leur disposition ?

Une démarche d’incubation-accélération s’inscrit forcément dans la durée. Nous proposons donc à nos porteurs de projet de les héberger ici jusqu’à 24 mois (durée maximale), moyennant un loyer dont le montant est fonction du nombre de postes et de l’aménagement de l’espace occupé (en openspace ou isolé). Nous les accompagnons ensuite dans la définition de leur stratégie et les challengeons quasi quotidiennement sur le brand content. Il importe que les porteurs de projet gardent à l’esprit le sens de leur démarche car c’est ainsi qu’ils pourront convaincre leurs interlocuteurs, à commencer par les investisseurs et financeurs. Nous les aidons aussi à éprouver leur concept auprès d’utilisateurs potentiels, soit tout l’enjeu de l’ « user experience ».

– Qu’en est-il, justement, des besoins de financement ? En quoi consiste votre accompagnement en la matière ?

J’allais naturellement y venir. Nous les accompagnons aussi dans leur recherche de subventions, d’investissements et/ou de crédits. Et tout aussi naturellement, nous les mettons en relation avec les conseillers et experts de BNP Paribas et de nos fonds partenaires (Paris-Saclay Seed Fund, Demeter, Partech ou encore Serena Capital) sans faire pour autant, je crois utile de le préciser, office d’agence bancaire : au WAI Massy-Saclay, nous n’avons pas vocation à ouvrir de comptes !
Un autre intérêt du WAI Massy-Saclay est d’être un lieu de connexions avec des personnes qualifiées. En moins de trois ans, nous en avons ainsi réalisé pas moins de 700. Des connexions diverses, qui vont de la plus ciblée au regard des besoins de la start-up aux connexions plus fortuites comme celles qui se produisent à l’occasion des conférences que nous organisons ici.

– Dans quelle mesure la proximité avec le Plateau de Saclay sert-elle votre projet ?

Il est clair que la proximité avec le Plateau de Saclay est un atout. Pour autant, je ne sous-estimerai pas notre proximité avec l’écosystème de Paris…

– De fait, votre emplacement à deux pas des gares RER (B et C) et TGV Massy-Palaiseau, vous fait bénéficier d’un haut niveau d’accessibilité…

Oui, et c’est un atout indéniable, qui fait aussi la spécificité du WAI Massy-Saclay. Cela étant dit, en trois ans d’existence, nous sommes parvenus à tisser des liens privilégiés avec plusieurs acteurs présents sur le Plateau de Saclay – nous intéragissons aussi bien avec des académiques qu’avec des représentants de grands groupes. A cet égard, une start-up comme PhD Talent, que nous accompagnons, est emblématique de notre volonté de décloisonner les univers de la recherche et de l’entreprise. Pour mémoire, cette start-up a vocation à mettre en relation de jeunes doctorants, de tout domaine disciplinaire (sciences exactes mais aussi sciences sociales et humaines), avec des entreprises confrontées à des problématiques exigeant une expertise précise.

– Venons-en aux tables rondes organisées à l’occasion de l’anniversaire du WAI Massy-Saclay (une première sur la blockchain, une deuxième sur les cleantech, une 3e sur l’entrepreneuriat féminin dans les deeptech). Qu’est-ce qui a présidé à leur choix ?

Depuis la création du WAI Massy-Saclay, nous souhaitions aborder les enjeux de l’IA et de la robotique. Tout naturellement, nous avons éprouvé le besoin d’élargir nos réflexions à des thématiques qui seront tout autant porteuses de changement pour la société dans son ensemble. C’est à l’évidence le cas de la blockchain, qui constitue une opportunité de faire du business autrement, non sans contribuer par là même occasion à redistribuer plus équitablement la richesse. Selon moi, nous sommes en présence d’une technologie d’avenir autant qu’a pu l’être le web à la fin des années 90 et plus récemment les plateformes numériques, mais qui ne devrait pas favoriser la constitution de nouveaux mastodontes comme peuvent l’être les GAFA (a priori, la blockchain favorise des échanges décentralisés).
De même, les cleantech ménagent la possibilité de changer de paradigme jusque dans la manière de produire et de consommer (c’était du moins le sujet de la deuxième table-ronde). Reconnaissons que le défi n’est pas gagné. Comme le faisait remarquer Habib Al Khatib, nous sommes tous plus ou moins « éco-radins » : nous sommes prêts à adopter des technologies efficientes au plan énergétique, mais à condition que cela nous coûtent moins cher ! De fait, c’est aussi le prix de marché qui conditionne la durabilité de solutions technologiques innovantes. Au risque de paraître trop optimiste, je continue cependant à croire dans le pouvoir de changer les consciences, pour parvenir à des comportements plus responsables.

– En déambulant d’un étage à l’autre comme vous nous aviez invité à le faire pour aller à la rencontre de vos start-up, j’ai pu constater que les équipes étaient mixtes, qu’il y avait beaucoup de jeunes femmes parmi vos startuppers. Preuve que l’entrepreneuriat féminin est une réalité ?

C’est ce qu’on examinera lors d’une troisième table ronde, à laquelle nous avons convié une demi douzaine de femmes impliquées dans le monde de la deeptech. Le WAI Massy-Saclay peut se réjouir de compter deux startuppeuses élues RED for Executive Women 2018 : Dounia Belghiti, cofondatrice de PhD Talent, et Elodie Morgan, de SpotLight.
Peut-il y avoir un entrepreneuriat féminin dans la deeptech ? J’espère que dans un avenir proche, nous n’aurons plus besoin de nous poser la question. Ma conviction, c’est que la différence, et pas seulement entre homme et femme, est une opportunité. Nous avons toujours à apprendre d’autrui même si, ou plutôt, surtout s’il est singulier. Quiconque entreprend ne peut le faire dans un entre soi : cela exige de savoir comment combiner des compétences variées.

– Un mot sur le Creativ’Lab inauguré à l’occasion de l’anniversaire de vos trois ans ?

Comme je le disais tout à l’heure, la blockchain, l’IA et la robotique sont à l’évidence au cœur de nouvelles révolutions. Pour autant, ces technologies ne sont pas appelées à se substituer à l’humain. En réalité, elles requièrent d’autres comportements et compétences proprement humaines, soit, parmi les principales : une expertise technologique et de la créativité, autrement dit une aptitude à aborder les défis sous un autre jour. C’est du moins ce qu’indiquaient les résultats d’une enquête réalisée auprès de 1 700 managers, répartis dans une douzaine de pays, publiée récemment dans la Haward Business Review.
Pour parfaire notre propre expertise technologique, nous comptons bien, au WAI Massy-Saclay, nous appuyer sur une start-up comme PhD Talent, qui a déjà démontré sa capacité à identifier des experts, parmi les milliers qu’elle est parvenue à mettre en réseau. Quant au rôle reconnu à la créativité, il nous incite à nous tourner davantage vers les neurosciences.
Rien de vraiment nouveau en réalité : cette ambition d’ouverture vers cette discipline est inscrite dans l’ADN du WAI Massy-Saclay, depuis sa création comme l’illustre IDiversity,  une démarche d’open source, co-développée avec des partenaires de l’écosystème – l’Université Paris-Saclay, Ericsson, dont le siège est situé à deux pas d’ici – et qui a déjà pour particularité d’intégrer les neurosciences pour accompagner les organisations dans l’identification et le développement des compétences de leurs collaborateurs [pour en savoir plus, cliquer ici]. Avec le Creativ’Lab, nous franchissons une autre étape en proposant un espace où il est possible de tester des idées à fort potentiel, susceptibles de remettre en cause les modèles économiques, de transformer nos modes de vie. Ni plus ni moins.

A lire aussi les entretiens avec Emmanuel Mannooretonil, directeur Développement nouveaux business de Butagaz, qui participait à une table ronde sur le thème des cleantech (pour y accéder, cliquer ici) et Dianée Baricault, directrice de BodyWork Concept, qui intervient en entreprise pour y prévenir les risques de troubles musculo-squelettiques, à travers des séances de gymnastique de santé (cliquer ici).

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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