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Vers une smart psychologie sociale ?

Le 27 mai 2019

Suite de nos échos à l’édition 2019 de Paris-Saclay SPRING à travers le témoignage de Barthélémy Bourdon Barón Muñoz, CEO et cofondateur de Hajime AI (à droite sur la photo), une start-up qui s’est placée à l’interface de la psychologie sociale et de l’intelligence artificielle (IA) pour améliorer l’observance thérapeutique.

– Si vous deviez pitcher Hajime AI ?

Nous sommes partis d’une problématique ancienne, mais à laquelle on peine à trouver une solution : l’observance thérapeutique, à savoir l’adéquation entre le comportement du patient et la prescription de son médecin. Des personnes ne la respectent pas avec tous les risques qu’il en résulte pour leur santé, mais aussi en termes de coûts pour la société. Nous nous proposons donc de mettre au jour des facteurs explicatifs à ce phénomène, de façon à faire évoluer le comportement des patients concernés. Pour cela, nous croisons deux champs de compétences qui ont été très peu combinés jusqu’à présent : la psychologie sociale, d’une part, l’intelligence artificielle (IA), d’autre part.

– Quelles compétences mobilisez-vous pour cela ?

L’équipe compte deux chercheurs en sciences humaines (des psychologues sociaux spécialisés en comportements de santé), un ingénieur en IA ; enfin, un développeur en informatique. Nous avons par ailleurs commencé à constituer un board stratégique avec des psychologues sociaux (dont un chercheur canadien éminemment reconnu, Gaston Godin) et des personnes du monde de la santé (un médecin, un pharmacien et des spécialistes des essais cliniques).

– Qu’est-ce qui vous a prédisposé à vous lancer dans cette aventure et à vous confronter à l’IA ?

Tout a commencé à l’occasion d’un hackathon, qui avait été organisé en octobre 2017 par un laboratoire pharmaceutique avec pour défi à relever celui d’améliorer justement la communication entre les patients et les soignants. J’y ai participé avec Simon, l’ingénieur en IA que j’évoquais et qui se trouve être un ami de plus de vingt ans : nous avons grandi ensemble dans le même quartier ! Lorsque nous avons pris connaissance de cet hackathon, nous nous sommes dit que c’était l’occasion de réunir nos compétences. Comme il fallait que l’équipe compte plus de deux personnes, j’ai sollicité un autre ami, l’autre psychologue social, Quentin, que j’avais rencontré sur les bancs de l’université, tandis que Simon a sollicité Jean-François, notre développeur informatique. Le hackathon s’est très bien passé : on a eu un grand plaisir à travailler ensemble et les membres du jury ont beaucoup apprécié le concept – ce mix entre psychologie sociale et IA. A l’issue de l’hackathon, nous avons pris cependant le temps de nous demander si nous étions prêts à aller plus loin, à nous lancer dans l’entrepreneuriat et, donc, à quitter nos emplois respectifs. La suite, vous la devinez : nous nous sommes dits qu’il fallait tout simplement foncer et saisir l’opportunité de vivre une belle aventure en développant un projet entrepreneurial. Après tout, tout s’était bien passé entre nous quatre et ce, depuis le début.

– Je trouve intéressant l’idée que le mariage improbable entre deux champs aussi différents que la psychologie sociale et l’IA ait été rendu concevable grâce à une amitié de plus de vingt ans entre deux jeunes qui avaient juste envie de travailler ensemble, quelles que soient au fond leurs disciplines de prédilection…

Exactement ! Et très vite, nous avons pu mesurer à quel point nos compétences respectives étaient en réalité très complémentaires. Seulement, personne n’avait songé à les associer, du moins en France. L’hackathon nous en aura donné l’opportunité.

– Où en êtes-vous dans le développement de votre start-up ?

Nous en sommes encore au stade de l’amorçage. Nous venons tout juste de créer la start-up – chacun en est cofondateur. Un premier POC (proof of concept) sera réalisé en juin avec un CHU de l’AP-HP, prêt à nous suivre pour étudier le cas de personnes sujettes à de l’obésité. Naturellement, par la suite, nous comptons bien travailler avec d’autres CHU.

– En quoi l’écosystème de Paris-Saclay a-t-il été favorable à l’éclosion de votre projet ?

Nous en faisons partie, étant incubés au SQY Cub, à Saint-Quentin-en-Yvelines. Ce qui nous a décidé à opter pour l’incubation, c’est notre rencontre avec Philippe Moreau, le directeur d’Incuballiance [partenaire du SQY Cub]. C’était à l’occasion d’un salon de l’AP-HP. Il nous avait tenu un discours qui nous avait beaucoup plu. Nous avons préalablement intégré le GenesisLab, un programme de trois mois, permettant de s’initier à l’entrepreneuriat innovant. Quelque chose de très utile pour les quatre jeunes, de 26 à 30 ans, sans la moindre expérience entrepreneuriale, que nous sommes. Notre intégration au SQY Cub nous a d’ores et déjà été bénéfique : il nous a mis en relation avec un autre CHU, celui de de Garches, avec lequel nous discutons pour une deuxième étude à la rentrée de septembre.
Bref, si je devais caractériser Paris-Saclay, je dirais que c’est un écosystème plus que favorable, tant au plan des ressources technologiques auxquelles il nous permet d’accéder, dans le domaine de l’IA et de la santé, que des précieux contacts qu’il permet de nouer.

– L’entretien se déroule à l’occasion de Paris-Saclay SPRING. Quel intérêt représente cet événement pour une toute jeune start-up comme la vôtre ?

Nous avons besoin de réseauter, ce que cet événement nous permet de faire. Au cours de cette seule journée, j’ai pu échanger avec les représentants de deux laboratoires pharmaceutiques, Ipsen et Servier [qui a projeté de rejoindre le Plateau de Saclay]. Comme les autres laboratoires pharmaceutiques, ils sont intéressés par l’enjeu de l’observance thérapeutique et de son amélioration. Les possibilités de synergie sont donc évidentes.

– Au fait, pourquoi Hajime AI ?

Hajime est le mot que l’on prononce, dans les arts martiaux, pour lancer un combat – en substance, cela signifie : « On y va ! ». C’est précisément ce que nous nous étions dit pour nous décider à faire l’hackathon. Depuis, le mot est resté, comme une manière aussi d’évoquer le patient qui doit se lancer dans un combat contre une maladie. Nous avons ensuite ajouté AI (pour Artificial Intelligence), en considérant qu’en recourant à celle-ci nous lui donnerions plus de chance de l’emporter.

A lire aussi :

– les comptes rendus de la cérémonie de clôture de Paris-Saclay Spring et du discours de Cédric Villani (pour y accéder, cliquer ici), de notre test d’un véhicule autonome dans le cadre du projet Paris-Saclay Autonomous Lab (cliquer ici) et de la table ronde « VC’s meet Clusters » (cliquer ici) ;

– les entretiens avec Nadège Faul, responsable des projets de transport autonome au sein de VEDECOM (cliquer ici) ; Sylvain Franger et Arun Kumar Meena, chercheurs l’Institut de chimie moléculaire et des matériaux d’Orsay (Université Paris-Sud), qui participent au développement d’une nouvelle génération de batteries (cliquer ici) ; Laëtitia Pronzola, fondatrice de Lotaëmi, une start-up, qui a conçu un baume essentiel pour soin capillaire et peau sèche à base d’ingrédients 100% naturels (cliquer ici).

Crédit photo : Arnaud Caillou.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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