Suite de nos échos au cycle de concertation autour de la ZPNAF lancé par l’EPA Paris-Saclay et animé par Terre et Cité avec, cette fois, le témoignage de Jacques de Givry, Président des Amis du Grand Parc de Versailles (AGPV) et membre du Conseil d’Administration de Terre & Cité.
– Quel regard portez-vous sur ce dispositif de concertation ?
Le dispositif, animé par Terre et Cité, avec des ateliers grand public, et d’autres destinés aux acteurs institutionnels, se révèle particulièrement efficace. Il donne lieu à de vraies séances de brainstorming autour des différents axes du programme d’action et de leurs fiches. Le fait de connaître par avance celles-ci a permis d’entrer dans le vif du sujet, en pointant notamment des redondances : des fiches traitées dans des axes différents gagnaient manifestement à être réunies. C’est le cas, par exemple, de la fiche sur l’étoile d’eau qui, de l’avis général, devait être traitée avec les autres fiches relatives à la biodiversité.
Au sein de chaque atelier, les participants se sont répartis dans des groupes suffisamment variés. Nous étions juste ce qu’il fallait – une dizaine de personnes par groupe en moyenne – pour engager une vraie discussion. Au-delà, il ne nous serait pas resté beaucoup de temps, après le premier tour de table destiné à se présenter…
– A quels ateliers avez-vous participé ?
J’ai pu assister aux deux ateliers de l’axe 2 (« Protection et mise en valeur des espaces naturels ») sur les espaces naturels ainsi qu’au premier atelier grand public autour du 3e axe (« Développer les liens entre le plateau, les activités et les habitants »). En revanche, je n’ai pu assister aux deux ateliers de l’axe 1 (« Appui aux projets agricoles »).
Naturellement j’en garde un peu de frustration mais, après tout, c’est le jeu. Si j’ai une critique à émettre, elle concerne plutôt l’absence d’indication sur les sommes susceptibles d’êtres engagées pour financer les actions. Certes, nous n’en sommes qu’à une phase de réflexion, mais cela aurait été utile pour formuler des propositions aussi crédibles que possible et rassurer quant à leur faisabilité.
– Quelles propositions avez-vous formulées ?
Concernant l’axe 2, sur les espaces naturels, mes propositions ont porté sur la trame verte et bleue : replanter des arbres fruitiers ; préserver les haies, car elles concourent, elles aussi, à la biodiversité ; mettre en valeur les étangs d’Orsigny et du Pré Clos. J’en ai profité pour recommander de limiter la vitesse sur la D446 qui passe entre les étangs de Saclay (comme elle file en ligne droite, on n’y compte plus les excès de vitesse) sans même attendre le lancement du programme d’action. J’ai aussi invité à ne pas oublier le pavillon du Roi, qui gagnerait à être lui aussi mieux mis en valeur. Comme d’autres, j’ai appuyé la création d’un Observatoire ornithologique.
J’ai bien sûr aussi appuyé celle de l’Observatoire photographique des paysages en proposant toutefois une approche plus souple que celle envisagée par le ministère de l’Environnement : des « figures libres » et d’autres imposées y seraient programmées, d’une année sur l’autre, en croisant de surcroît paysage et patrimoine.
Concernant l’axe 3, j’ai pris part aux discussions autour de la signalétique (fiche 20). Un chiffre n’a pas manqué de provoquer de vives réactions : 50 000 euros, soit le montant prévu pour faire cohabiter les automobilistes et les exploitants agricoles et forestiers ! J’ai pour ma part insisté sur la nécessité d’envisager la signalétique à l’échelle de l’ensemble des communes de l’OIN et pas seulement de la ZPNAF. J’ai aussi échangé autour de la fiche relative à l’animation du territoire en proposant de concevoir en priorité un logo symbolisant son identité.
– Avez-vous le sentiment d’avoir été entendu ?
Oui, du moins par les participants. S’agissant, par exemple, de l’Observatoire photographique du paysage, j’ai perçu un réel intérêt de la part de M. Stéphane Sarkissian, directeur du Développement durable, au sein de l’EPA Paris-Saclay, ainsi que chez les représentants du CAUE de l’Essonne.
Manifestement, mon expérience en matière de signalétique identitaire et patrimoniale, à base de photos, sur la Plaine de Versailles a aussi retenu l’attention. Je suis donc confiant quant à la suite en considérant toutefois qu’il ne faudrait pas tarder : le Plateau de Saclay est déjà hérissé de grues ; cela vaudrait donc le coup de rendre compte du paysage avant et après les projets d’aménagement et de construction.
En revanche, concernant l’Observatoire ornithologique, j’avoue avoir été un peu décontenancé de devoir comprendre qu’on allait bien le faire, mais en se hâtant lentement. Une chose est cependant acquise, et c’est réconfortant : les compétences nécessaires pour animer cet observatoire existent et il a été admis qu’elles étaient déjà présentes sur le territoire.
S’agissant de la trame verte et bleue, la question demeure de savoir comment on pourrait rétablir la continuité des systèmes de rigoles, mise à mal suite, notamment, à la construction de la N118 et, ainsi, assurer un meilleur drainage du territoire. Le drainage, voilà un enjeu qui retient tout particulièrement l’attention des gens d’ici, et pas seulement les agriculteurs. La qualité paysagère et la fertilité du Plateau de Saclay reposent de fait beaucoup sur son efficacité.
– A vous entendre, beaucoup d’idées ont été énoncées, de surcroît avec franchise. Mais que diriez-vous à ceux qui pourraient craindre un catalogue d’intentions, certes intéressantes, mais pas forcément cohérentes et surtout sans vision partagée ?
Ce fourmillement d’idées, souvent de bon sens, raisonnables et d’autant plus compréhensibles de tous, était un passage obligé. Il va donner lieu à un document de synthèse qui permettra d’avoir une vue d’ensemble. Un but a manifestement d’ores et déjà été atteint : les participants ont le sentiment d’avoir pu s’exprimer. Il est vrai que nous commençons à nous connaître et, donc, à avoir une vision partagée de la ZPNAF et de ses enjeux. Hormis quelques échanges vifs, il n’y a pas eu de débats contradictoires, du moins dans les groupes auxquels j’ai participé : 90% des participants partageaient clairement les idées qui étaient émises. Ce qui, en soi, est un résultat remarquable.
– Des sujets en particulier n’ont-il pas éveillé des passions ?
Si, celui des circulations douces ! Les gens, moi y compris, trouvent qu’on ne va pas assez vite en la matière. Or, sans de telles circulations, la ZPNAF reste encore à certains endroits peu pénétrable pour les amateurs de balades ou pour aller à l’école ou au travail. D’aucuns ont regretté l’insuffisance de parkings aux alentours : des itinéraires balisés existent, mais il n’est pas toujours évident de pouvoir poser sa voiture pour faire sa boucle de randonnée. La fiche relative à ce thème des circulations douces n’a pas semblé assez claire quant aux emprises dont nous disposerions, notamment en matière de pistes cyclables : peut-on envisager d’en aménager de nouvelles au sein de la ZPNAF ou devons-nous nous contenter de restaurer celles déjà existantes ?
Ces considérations ne doivent pas cependant faire oublier l’impression générale, plus que positive : beaucoup de propositions et de suggestions souvent intéressantes ont été faites. A chaque atelier, pas moins de trois grands posters ont été nécessaires pour les recueillir !
– N’est-ce pas la preuve qu’au-delà de l’acronyme, la ZPNAF fait sens et ne laisse pas indifférent ?
Oui, en effet. Cependant, je considère encore une fois que le programme d’action aura d’autant plus de sens que l’on envisagera cette ZPNAF dans son rapport au reste de l’OIN. D’ailleurs, je constate que le mot de protection n’a plus été autant convoqué que par le passé. Il figure toujours dans l’acronyme, mais il revient assez rarement dans les échanges. Les gens sont manifestement passés du stade de la protection passive à une dynamique de valorisation. La ZPNAF ne sera viable à long terme que dans la mesure où elle sera porteuse de projets répondant aux attentes de son environnement urbain. Son avenir est de fait lié à l’ensemble des 28 communes de l’OIN Paris-Saclay et pas seulement aux 15 qui figurent strictement dans son périmètre de « petite région agricole ».
A lire aussi le témoignage de Karine Lefebvre, chargée d’études au Parc naturel régional de la Haute Vallée de Chevreuse (cliquer ici).
En illustration de cet article : une vue de la ZPNAF, à l’ouest de Loges-en-Josas, sur la route de Buc (par Jacques de Givry).
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