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Santé

Traitement de la tuberculose : la solution EpiLab

Le 13 avril 2023

Créée en 2020, actuellement hébergée au Drahi - X Novation Center, EpiLab propose de révolutionner les tests pour le traitement de la tuberculose. Son CEO et cofondateur, Maurice Lubetzki (à droite sur la photo) nous en dit plus.

- Si vous deviez pitcher Epilab ?

ML : EpiLab est né d’un constat : avant la Covid-19, la tuberculose était encore la première cause infectieuse dans le monde – chaque année, on enregistre 10 millions de nouveaux cas, pour 1,5 million de décès. Des solutions thérapeutiques existent pour détecter cette maladie et sont bien connues de l’OMS qui les a recensées. Mais dans les pays du Sud – les plus concernés avec 80% des cas – aucune ne permet de réaliser un test au plus près du patient, du fait de l’absence d’infrastructure, de personnels de santé qualifiés en nombre suffisant.
Avec mon associé Clément Dubois, nous avons donc entrepris de développer une solution moins onéreuse et facile à mettre en œuvre – un test miniaturisé et automatisé – en exploitant un brevet déposé par deux chercheuses de l’université Bourgogne et de l’Inrae, Murielle Rochelet et Élodie Barbier. Clément est Centralien, titulaire d’un master en biotechnologies ; moi, je suis diplômé des Arts et Métiers et ai monté une précédente société. Nous apportons ainsi notre expertise d’ingénieur et notre expérience dans la gestion de l’aspect hardware du projet.

- Comment vous êtes-vous retrouvés au Drahi – X Novation Center ?

ML : Très vite, nous sommes partis en quête d’un incubateur pour aborder dans les meilleures conditions la phase de prototypage, dans un environnement DeepTech. C’est ainsi que nous avons postulé à celui de l’X et été sélectionnés – nous avons fait partie des cinq lauréats parmi une centaine de candidatures. Nous y sommes depuis deux ans, après être passés par X’Up, la structure d’accélération (neuf mois), puis par X Tech, la structure de maturation des start-up. Nos effectifs sont entretemps passés de quatre à une douzaine de personnes.

- Avec le recul dont vous disposez, quels avantages mettriez-vous en avant dans le fait d’être au Drahi – X Novation Center ?

ML : J’en mettrai au moins trois. D’abord, la crédibilité que confère le fait d’être implanté sur le campus de l’X. Cela nous facilite nos recherches de partenaires, de financements, et nos recrutements.
Ensuite, les ressources humaines et technologiques auxquelles il permet d’accéder : son FabLab, qui nous permet de réaliser nos prototypes, au moyen des machines d’impression 3D de dernière génération ; un laboratoire, tout proche, où nous pouvons faire des expérimentations sur des puces microphysiques dans les conditions de la R&D de grands groupes, ce qui nous permet de réduire les coûts par cent ; un autre, de microbiologie, tout proche, où nous pouvons réaliser directement nos tests.
Enfin, troisième avantage : l’agilité. Quelque chose d’essentiel quand on sait qu’une start-up a besoin d’identifier des problématiques et de mobiliser des ressources en conséquence pour explorer des pistes originales et ce dans des laps de temps aussi courts que possible.

- Quelles pistes en l’occurrence ?

ML : Au plan disciplinaire, nous avons commencé par investir la microbiologie, l’électrochimie (pour la détection de la tuberculose à partir d’un courant électrique) et la conception mécanique avant de constater que ces champs étaient trop limités par rapport à nos ambitions. C’est ainsi que nous en sommes venus à investir celui de la microphysique. Pour cela, nous avons pu solliciter le réseau de Polytechnique de façon à identifier des micro-fluidiciens, chercheurs et PhD, et échanger avec des doctorants qui rencontraient des problématiques similaires aux nôtres… C’est ainsi, petit à petit, que nous sommes parvenus à prototyper une techno en micro-fluidique alors que ni Clément ni moi n’avions la moindre compétence dans ce domaine.

- Quels verrous technologiques avez-vous levés ?

ML : L’un des premiers est d’ordre biologique. L’échantillon que nous prélevons sur le patient a des caractéristiques physico-chimiques : il présente un niveau de viscosité différent d’un patient à l’autre. Il est donc compliqué d’en homogénéiser les caractéristiques. Une piste consiste à recourir à une décoction chimique qui va pénétrer dans l’échantillon d’expectoration et l’homogénéiser. Ensuite, il faut permettre à nos tests d’être robustes. Plus facile à dire qu’à faire, car il nous faut prototyper toujours de la même manière. Or les dimensions du test sont si petites qu’il faut disposer d’outils de prototypage extrêmement précis. De là les enjeux du prototypage que j’évoquais.

- Rappelons que le campus se trouve au cœur de l’écosystème de Paris-Saclay. Quels avantages représentent-il pour vous ?

ML : Le fait d’être présent sur le plateau de Saclay confère une visibilité évidente auprès des investisseurs et de partenaires potentiels. Si nous étions à Paris, nous serions une MedTech parmi tant d’autres. Ici, nous sommes « la » MedTech du Drahi – X Novation Center…

- Rassurez-nous, il y en a bien d’autres ?

ML : Oui, effectivement, mais disons que l’écosystème est encore loin d’en créer autant que celui de Paris, plus orienté sur le software, il est vrai. Or, pour une société comme la nôtre, qui est dans une technologie de rupture, sans réaliser encore de CA, il est essentiel de gagner en visibilité, de démontrer rapidement sa capacité à innover aux yeux des investisseurs.
Etre présent ici a d’autant plus de sens que la plupart de nos collaborateurs sont issus de l’écosystème et pas seulement de l’X. Notre responsable R&D, Manon Giraud, et des mentors sont rattachés au Centre de nanosciences et nanotechnologies (C2N). Et puis Paris-Saclay ne cesse d’attirer de nouveaux acteurs. Voyez le laboratoire Servier, qui collabore avec BioLabs, un accélérateur de start-up de référence. Je ne vois pas pourquoi nous irions à Paris quand on peut rester ici, qu’on peut y maturer son projet. Enfin, ici, tout le monde se connaît : il y a une vraie communauté – de chercheurs, de startuppers, d’investisseurs. L’entraide n’y ait pas un vain mot. Quand on rencontre un problème, on peut le soumettre à d’autres, y compris de filières industrielles – beaucoup recourent à des technos hardware assez proches.

- Un mot sur le le future Hôpital en cours de construction dans le quartier de Corbeville…

ML : Nous espérons qu’EpiLab décollera bien avant l’inauguration de ce Groupe hospitalier ! Cela étant dit, je fonde beaucoup d’espoir dans ce dernier pour faire évoluer les interactions entre les différents acteurs. En France, nous peinons encore à promouvoir des collaborations entre les sphères publique et privée, dans le domaine de la santé en particulier. Aux Etats-Unis, et dans bien d’autres pays, les hôpitaux universitaires ont une longue expérience de collaboration avec les laboratoires privés. Pas étonnant à ce que les géants de la MedTech aient fait le choix de s’implanter à Boston. Intégrer un centre hospitalier, de proximité et tourné vers la recherche clinique, dans un écosystème d’innovation est forcément un plus, pour peu qu’il soit ouvert à l’innovation, ce qui sera justement l’ambition du futur GHNE. S’il pouvait traiter des patients et en plus favoriser le parcours clinique vers de nouvelles technologies, tout le monde serait gagnant.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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