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Science & Culture

TEDxSaclayWomen : un TEDxSaclay au féminin

Le 24 mars 2025

Entretien avec Christian Van Gysel

Le 6 mars dernier, se déroulait la première édition du TEDxSaclayWomen. En voici un écho à travers cet entretien avec Christian Van Gysel, qu’on ne présente plus. Précisons juste qu’il fait partie des cofondateurs avec… quatre femmes. Une illustration de ce que les hommes ont toute leur place dans cet événement destiné avant tout à traiter de problématiques au féminin.

- La première édition de TEDxSaclayWomen s’est déroulée voici près d’une semaine. Avec le recul, quels premiers enseignements souhaiteriez-vous mettre en avant ?

Christian Van Gysel : En premier lieu, je tiens à remercier le Danone Research & Innovation – Daniel Carasso Center, de Paris-Saclay et ses équipes, et en particulier Marion [Meslin], responsable de la communication, qui s’est fortement impliquée dans l’organisation de l’événement en plus de mettre à disposition une grande partie des des espaces du site, parmi ceux accessibles aux visiteurs : l’entrée, l’auditorium, l’espace restauration, des salles de réunion… Un superbe accueil !

- Un lieu dont on a pu prendre aussi la mesure des capacités d’accueil…

C. V. G. : En effet. Pas moins de 300 personnes s’étaient inscrites que nous avons pu accueillir, quitte à devoir ajouter des sièges supplémentaires, ce qui, au passage, permettait de suivre les talks depuis des perspectives inattendues, en étant, par exemple, installé juste au dessus de la scène, comme au théâtre. Cette influence nous a fait forcément plaisir : c’était bien la preuve que notre intuition de faire un TEDxSaclayWomen était fondée.

- Au-delà de cette affluence et de l’accueil de Danone, que retenez-vous de cette première édition ?

C. V. G. : Comme l’explique bien Assya dans l’entretien qu’elle vous a accordé en amont de l’événement, notre intention n’était pas de faire un TEDxSaclayWomen dans une perspective féministe, de lutte des femmes, mais bien pour la cause du féminin, lequel n’est pas propre aux femmes. En déclinant les profils d’intervenants – enseignant-chercheur, entrepreneur, dirigeant, manager, artiste, sportif,… – nous souhaitions aussi montrer que ce féminin a toute sa place, qui qu’on soit, quel que soit le métier, l’activité qu’on exerce, et donc qu’hommes et femmes étaient faits pour collaborer en parfaite harmonie.

- Un couple l’illustre à sa façon, que nous connaissons bien à Paris-Saclay, c’est celui que vous formez avec Assya !

C. V. G. : Exactement ! J’ajouterai qu’à partir du moment où on laisse de côté ses préjugés sur les femmes quand on est un homme ou sur les hommes quand on est une femme, on découvre qu’on peut faire énormément de choses ensemble, qu’on peut lever bien des obstacles. Même chose quand on assume sa part de féminité quand on est un homme : on ne se demande plus, à la naissance d’un enfant, si on doit prendre un congé de paternité. On le prend ! En sens inverse, une femme ne devrait pas avoir de scrupule à privilégier sa carrière professionnelle comme tout homme est enclin à le faire naturellement.

- Le poids de ces préjugés, de ces freins psychologiques, est revenu comme un leitmotiv au fil des talks, à commencer par celui de Sylvie Retailleau qui a traité des préjugés et autres freins qui empêchant des filles de s’engager dans des filières scientifiques ou des femmes de faire carrière dans la recherche ou encore d’être reconnues pour leur contribution aux grandes découvertes scientifiques. Un talk qu’elle avait préparé avec soin et dans lequel on l’a sentie particulièrement engagée. Qu’est-ce que cela dit d’ailleurs de son rapport au TEDxSaclay auquel elle avait déjà participé en 2021.

C.V.G. : Sylvie Retailleau n’est autre que la marraine de TEDxSaclay et ce, depuis le début – tandis que Cédric Villani en est le parrain, également depuis le début. Elle et lui nous ont manifesté un soutien constant. Merci à eux ! En 2021, nous avions convaincu Sylvie de faire un TEDxSaclay, ce qu’elle a accepté malgré les contraintes qui pesaient sur son agenda – elle était présidente de l’Université de Paris-Saclay. Nous ne savions pas alors que, six mois plus tard, elle serait nommée ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche !

- Peut-on parler d’un effet TEDxSaclay ?

C V. G. : [Rire]. Oui, on peut le faire et ce n’est pas moi qui le dis, mais Cédric Villani qui est devenu député l’année de son premier TEDxSaclay, si on excepte sa participation à la première édition [2015] à travers une vidéo de son talk au TEDxParis.

- Pour en revenir à Sylvie Retailleau, elle a d’autant plus de mérite d’avoir honoré le TEDxSaclayWomen que, bien que n’étant plus ministre, son agenda n’en reste pas moins contraint. D’ailleurs, dès le lendemain, elle était à Rennes pour participer à une manifestation dans le cadre de la journée Stand-up for science organisée en soutien à la recherche américaine menacée par l’administration Trump.

C.V.G. : En effet. Rappelons un autre de ses mérites : avoir porté haut les couleurs de l’Université Paris-Saclay dont le conseil d’administration était composé majoritairement d’hommes. Ce qu’elle s’est amusée à rappeler en projetant une photo d’une conférence de presse qui valait tout les discours : elle était la seule femme à la tribune, au milieu d’une douzaine de directeurs d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche associés à la nouvelle université… Elle illustre à merveille l’esprit du TEDxSaclayWomen : c’est une femme volontaire, déterminée, qui ne sacrifie pour autant pas les vertus qu’on associe à la féminité : elle est tout sauf hautaine, austère mais, au contraire, chaleureuse. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des convictions et un réel sens de l’engagement.

- Un juste équilibre qu’on retrouve chez d’autres intervenantes : je pense à cette femme, Jeanne Sorin, qui s’est mise à faire du rugby à l’âge de 21 ans, ou encore à cette ingénieure générale des Ponts, Sandrine Gourlet. Elles ont fait montre d’un tempérament dont on sent qu’il leur a été utile pour surmonter bien des obstacles et des freins tout en restant elles-mêmes…

C. V. G. : Oui, et ce qu’il y avait aussi d’intéressant dans leur témoignage, c’est qu’elles ne sont pas tombées dans l’écueil consistant, pour faire carrière, à se comporter « comme un homme », mais au contraire en s’assumant telles qu’elles sont, avec leur part de féminité. C’est vrai de la rugbywoman comme de l’ingénieure ou encore, dans un autre domaine, artistique, de Milène Guermont qui a su s’imposer à la fois dans le monde des ingénieurs (elle l’est elle-même) tout en s’épanouissant dans la création.

- Ce faisant, elles ont incité les hommes à assumer leur part de féminité. Ce qu’a fait d’ailleurs un des intervenants masculin, Olivier Dufour, entrepreneur et coach professionnel, qui a revendiqué des qualités qu’on associe spontanément, au prix de préjugés, aux femmes…

C.V.G. : Exactement. Il est intéressant d’observer que les préjugés s’appliquent aussi bien aux femmes qu’aux hommes, que le sexisme est plus répandu qu’on le croit, ainsi que l’a montré le deuxième intervenant, Benoît Dardenne, spécialiste de psychologie sociale. Les hommes sont enfermés dans des préjugés qui considèrent qu’ils sont plus ceci et cela, en l’occurrence, plus volontaires que les femmes, plus forts, plus courageux, plus rationnels que sensibles, etc. Pourtant, rien ne devrait nous empêcher, nous les hommes, à nous assumer tels que nous sommes, aussi « paternels » que des femmes peuvent être maternelles. À cet égard, je ne résiste pas à l’envie de saluer cette campagne d’affiche qui promeut le métier de sage-femme en donnant à voir un homme tenant un bébé dans ses bras…

- Venons-en à vous et à cette situation particulière où vous vous êtes retrouvé : celle de brainstormer sur le projet de TEDxSaclayWomen avec quatre autres personnes qui n’étaient que des femmmes, cofondatrices de l’événement – outre Assya, Corine Borel, Pauline Plisson, Pascale Ribon et Julie Credou. Comment cela s’est-il passé ? Avez-vous eu voix au chapitre ? [Sourire].

C.V.G. : Oui, tout à fait ! À aucun moment, je me suis senti discriminé au prétexte que j’étais le seul homme du groupe ! En fait, nous avions à cœur, Assya et moi, de porter ce projet, dont la gestion aura pris près de trois ans – la première fois que nous nous sommes réunis à ce sujet, c’était en mars 2022 -, pour toutes les raisons qu’elle a eu l’occasion de rappeler dans l’entretien, à commencer par le fait de vouloir être au clair sur ce que nous voulions. Ou, plutôt, sur ce que nous ne voulions pas, à savoir : participer à ce féminisme radical qui tend à opposer les hommes et les femmes. Au contraire, nous souhaitions que notre TEDxSaclayWomen soit l’occasion de souligner les complémentarités et combien les qualités associées à la féminité peuvent aussi s’observer chez des hommes. D’où, d‘ailleurs, le fait d’user dans notre signature d’un M majuscule [WoMen] pour rappeler que ce TEDx est ouvert aux hommes – cette première édition en comptait ainsi deux parmi les neuf intervenants.
Parmi ces qualités, il y a justement l’acceptation de prendre son temps, de laisser maturer les choses, là où le « masculin » est peut-être plus enclin à se lancer et à avancer en se disant qu’il pourra toujours apporter des réponses aux questions à mesure qu’elles se posent.
Mais ce que nous voulions aussi, c’est de montrer comment des femmes et des hommes pouvaient faire carrière en ne cherchant pas à cacher cette part de féminité, en ne s’autocensurant pas mais, au contraire, en l’assumant, qu’ils/elles soient cadres d’entreprise, managers, chercheur.euse.s, entrepreneur.e.s, artistes,… Certes, cela peut prendre plus de temps, obliger à emprunter des chemins de traverse, mais cela en vaut la peine.

- Rappelons qu’il existe peu de TEDxWomen. Le vôtre aura donc pris naissance dans l’écosystème de Paris-Saclay. Dans quelle mesure celui-ci a-t-il été un terreau favorable ?

C.V.G. : En ceci qu’on y croise toute sortes de personnes, d’horizons très différents, dont on peut apprécier les qualités, les talents, de chercheur.euse, d’entrepreneur.e, d’ingénieur.e, d’artiste, indépendamment du fait que ce sont des hommes ou des femmes.

- À vous entendre, je comprends qu’une chose est acquise : il y aura une deuxième édition…

C.V.G. : À voir les retours sur la première édition, on ne peut qu’avoir envie d’en faire une deuxième. Après, gardons à l’esprit que l’organisation d’un tel événement demande beaucoup de préparation, et de travail en amont et le jour J, qui s’ajoute à celui consenti pour TEDxSaclay, programmé en juin, et TEDxYouth@Saclay programmé en octobre.

- Sachant que vous pouvez vous appuyer sur une équipe « formidable » pour reprendre la formule d’une de vos bénévoles…

C.V.G. : Oui, et on ne le dira jamais assez, entre les bénévoles qui se mettent en quatre pour identifier des partenaires, les premiers intervenants, et ceux en charge de l’organisation technique de l’événement, en direct, sans oublier nos iConnecteurs. Au total, une soixantaine de bénévoles…

- Dont beaucoup de femmes…

C.V.G. : [Il réfléchit]. En effet !

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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