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Stockage d’énergie, une solution qui ne manque pas d’air.

Le 24 juin 2016

Suite de nos échos à l’appel à idées du TEDxSaclay avec, cette fois, le témoignage du second lauréat, Andreï Klochko, un polytechnicien, dont la start-up, Airthium, s’emploie à révolutionner les conditions de stockage de l’énergie.

– Si vous deviez vous présenter en quelques mots…

Je suis Polytechnicien (X 2007), passionné depuis toujours par la physique et les mathématiques. J’ai particulièrement apprécié les années de classes préparatoires car j’avais le sentiment qu’on entrait dans le fond des choses. Pour autant, j’ai été surpris d’intégrer Polytechnique. Je ne m’y attendais tout simplement pas ! Puis, j’ai fait une thèse au Laboratoire de physique des plasmas. Une autre source de plaisir quand, au bout de la troisième année, toutes les pièces du puzzle se mettent en place pour éclairer enfin le sens des phénomènes que vous étudiez. Puis j’ai fait un post-doc, avant de me lancer dans la création d’une start-up, Airthium.

– Comment l’idée d’une start-up a-t-elle germé ?

Très tôt, en réalité, en mai 2014, précisément. Ce fut suite à une rencontre avec des personnes qui avaient visité le laboratoire où j’achevais ma thèse. Intéressés par certains de mes travaux de recherche antérieurs, elles m’ont aussitôt branché sur un projet de start-up. J’ai même été sur le point de signer le pacte d’actionnaires qu’elles me proposaient. Mais, au fil de nos discussions, j’en suis venu à une tout autre idée. A deux jours de la signature, Matthieu Somekh (responsable de La Fibre Entrepreneur) et Serge Chanchole (X-Technologies) m’ont convaincu de créer ma propre start-up et d’en constituer progressivement l’équipe.

– Quel est le concept ?

Il s’agit d’une super-batterie capable de stocker de grandes quantités d’énergie puis de les restituer avec un minimum de pertes et à un prix compétitif. Notre solution vient s’intégrer dans le circuit de centrales éoliennes ou solaires, ainsi que dans le système de gestion de l’énergie de sites industriels. Elle permet de gérer les pics de consommation, et d’acheter l’énergie lorsqu’elle est la moins chère, tout en récupérant la chaleur perdue des machines industrielles.

– Comment vous démarquez-vous des autres offres ?

De deux façons. D’une part, notre solution procède à partir d’une technique améliorée de compression d’air, dite « quasi-isotherme ». En évacuant la chaleur au fur et à mesure qu’on le comprime, on parvient à une transformation réversible. Il n’y a donc plus qu’à inverser le processus pour récupérer l’énergie dans sa quasi intégralité. On enregistre juste les pertes liées à l’imperfection du mécanisme, des pertes marginales. D’autre part, grâce à notre technologie innovante exclusive, notre machine possède une simplicité mécanique et, donc, une fiabilité inégalées. C’est ce dernier point qui constitue vraiment notre facteur différenciant, notre singularité.

– En quoi est-elle innovante ?

De fait, le principe de l’air comprimé existe depuis plus d’un siècle. Des métros et des automobiles ont fonctionné selon ce principe, mais avec une mauvaise efficacité. Quand l’air se décomprime dans les machines existantes, il se refroidit beaucoup, car on ne parvient pas à lui transmettre la chaleur ambiante suffisamment vite, sauf à disposer de pistons assez fins.
Notre solution, quant à elle, repose sur une pompe hydraulique qui permet l’utilisation de cylindres extrêmement fins, ayant un bien meilleur rendement. Une solution complémentaire, au final, des Stations de Transfert d’Énergie par Pompage (STEP), qui présentent, elles, d’autres inconvénients (le cycle de pompage / turbinage des STEP engendre des pertes d’énergie qui peuvent osciller entre 15% et 30%). Elles peuvent avoir aussi des conséquences néfastes sur le paysage et l’hydrologie. Enfin, elles imposent d’être situées dans les régions montagneuses ou à proximité d’un barrage, là où notre solution, tenant dans un conteneur 20 pieds standard, peut être déployée partout.

– Etes-vous pionnier ou engagé dans une course contre la montre avec d’autres concurrents et solutions alternatives ?

Nous sommes assurément dans une course contre la montre. Le prix du lithium baisse de manière drastique. Je vois dans mon radar pointer d’autres technologies d’ici à peine cinq ans. Mais nous avons un avantage que n’a pas le lithium : notre batterie peut être installée dans un bâtiment, non seulement pour stocker l’énergie qu’il produit (à travers l’énergie solaire, par exemple), mais également faire office de pompe à chaleur et assurer ainsi le chauffage de l’eau ou la climatisation. Ce qui réduit d’autant le coût du stockage. Sans compter des possibilités décuplées avec les opportunités offertes par le smart-grid.

– N’êtes-vous pas victime actuellement de la baise du prix de l’énergie ?

Certes, le prix de l’énergie baisse actuellement, mais subsiste un prix plancher lié aux conditions de production de l’électricité à base des énergies fossiles. Et puis cette baisse est transitoire. L’avenir appartient aux EnR, et donc au stockage pour répondre au problème posé par l’intermittence des principales d’entre elles, l’éolien et le photovoltaïque, en l’occurrence.

– Où en est votre start-up en terme de développement ?

Nous sommes deux associés et comptons recruter à l’issue de notre première levée de fonds programmée en 2017. Pour l’heure, nous avons un stagiaire que nous comptons garder avec nous.

– Vous avez été lauréat de plusieurs concours. Que vous apporte de plus une participation au TEDx Saclay ?

J’ai en effet été lauréat du Prix Jean-Louis Gerondeau-Zodiac Aerospace et du concours de création d’entreprise Petit Poucet. J’ai également candidaté au concours EDF Pulse et remporté deux fois l’appel à projet prématuration étudiant Paris-Saclay. Enfin, récemment, nous avons remporté le Prix des Innovateurs d’ArcelorMittal. Mais, cette fois, l’optique était différente. La vocation de TEDx est de partager d’abord une idée qui peut transformer le monde. L’appel à idées m’a obligé à revenir aux raisons fondamentales pour lesquelles je m’étais lancé dans la création d’une start-up autour de ce concept de stockage. Je n’ai donc pas cherché à vendre ma start-up mais une autre vision de la transition énergétique. Je devais m’adresser à un public divers, et non exclusivement à des investisseurs potentiels.

A lire également : l’entretien avec Assya Van Gysel (cliquer ici) ; Pauline Maisonnasse, l’autre lauréate (cliquer ici) et Saranne Peythieu, membre de l’équipe TEDx Saclay (entretien à venir). Pour en savoir plus sur Airthium, cliquer ici.

 

Publié dans :

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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