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Entrepreneuriat innovant

Saturation de réseaux : la solution OP’Connect

Le 25 octobre 2024

Rencontre avec Aboubakar Bayero et Paul Remazeilles, qui portent le projet OP'Connect au sein de la FIE de l'Institut d'Optique.

Suite de nos échos à la journée d’inauguration du bâtiment 503 entièrement rénové avec, cette fois, le double témoignage d’Aboubakar Bayero et Paul Remazeilles, qui portent le projet OP’Connect dans le cadre de la Filière Innovation Entrepreneur.e.s. de l’Institut d’Optique

- Si vous deviez, pour commencer, pitcher OP’Connect, votre projet développé dans le cadre de la FIE ?

Aboubakar Bayero : OP’Connect – OP pour Optical – est aujourd’hui le projet de start-up que nous développons avec Paul. Nous travaillons ensemble depuis notre première année de FIE, avec un chercheur du CNRS à Bordeaux, M. Bernon, qui s’est attaqué aux problématiques de couverture réseau dans des zones à forte saturation spectrale – des zones où on rencontre des difficultés à capter la connexion Internet, tout simplement parce qu’il y a trop d’usagers en train de l’utiliser. Cette saturation se produit notamment à l’occasion de rassemblements de type concert, festival… La technologie que nous développons peut trouver bien d’autres contextes d’application : elle permet de couvrir aussi des zones où la fibre optique est absente, comme par exemple, dans certaines parties de l’Afrique, ou même en France, dans le rural profond, confrontés à des problèmes élevés de connectivité.

Paul Remazeilles : Notre solution est une alternative à la fibre optique, qui présente l’inconvénient d’être non seulement coûteuse, mais encore longue à installer. Exploitant les ressources du laser, la nôtre permet d’éviter tous ces écueils : sécurisée, accessible financièrement et faible impact sur l’environnement, elle peut être déployée rapidement, en plus de garantir un débit élevé d’information.

- Comment êtes vous parvenus à ce résultat ? Au prix d’une démarche itérative, d’un pivot ? Ces questions sont une invite à préciser dans quelle mesure la FIE est l’occasion de maturer son projet de start-up…

Aboubakar Bayero : Effectivement, quand nous avons débuté la FIE, nous étions partis, avec un autre camarade, Romain [Étienne], sur un tout autre projet, qu’on peut qualifier aujourd’hui de « bac à sable » au sens où il nous aura permis de nous familiariser avec la démarche entrepreneuriale innovante. Il portait sur des bornes de recharge pour bateaux électriques, un projet très intéressant, mais dont nous nous sommes rendus compte qu’il nous plaçait devant des challenges techniques trop élevés pour nous. En décembre 2023, nous avons donc procédé à un pivot. Ce mois-là, des « apporteurs d’idées » – des chercheurs du CNRS et de l’Institut Optique – étaient intervenus pour exposer des résultats de recherche, des briques technologiques développées dans leur laboratoire, susceptibles d’être valorisées, et convaincre des élèves-entrepreneurs à voir s’il n’y avait pas des applications possibles, des marchés. C’est ainsi que nous avons rejoint M. Bernon.

Paul Remazeilles
: Comme cela a été dit par Alain Aspect lui-même, lors d’une conférence organisée en ce jour d’inauguration, une des caractéristiques majeures du startupper est d’être agile. Si en creusant une piste, il s’aperçoit qu’il n’y a pas de marché, il ne faut pas insister ; il faut savoir pivoter sans s’interdire de s’associer à d’autres personnes, de renoncer à poursuivre l’exploration avec son ou ses premiers associés. Les années FIE permettent cela : au fil de temps, entre élèves ingénieur.e.s, on se découvre des affinités ; les équipes se composent et se recomposent avant de se stabiliser. Moi-même, je ne suis arrivé que dans un second temps dans le projet OP’Connect, rejoint par un autre camarade, absent aujourd’hui car il est actuellement à Milan dans le cadre d’un semestre d’échange.

Aboubakar Bayero : Le contexte dans lequel Paul nous a rejoints est intéressant en ceci que nous nous connaissions déjà, avant même de nous lancer dans ce projet – nous avions eu à travailler ensemble sur d’autres projets, notamment les TP de l’Institut Optique (sourire) ! Et au vu des compétences qu’il a dans le domaine commercial, sa faculté à aller à la rencontre des autres, j’ai jugé utile de lui faire part du projet OP’Connect et de l’inviter à nous rejoindre.

- Où en êtes-vous dans le développement de ce projet ?

Aboubakar Bayero : Depuis six mois, nous sommes en phase de prototypage, dans un laboratoire de l’Institut Optique de Bordeaux. Cette phase nous mobilisera encore jusqu’en décembre 2024/janvier 2025. Suite à quoi, nous pourrions, à l’issue de notre stage de fin d’études, lancer effectivement notre start-up.

Paul Remazeilles : En parallèle à cette phase de prototypage, nous comptons déposer un brevet sur notre technologie, de façon ensuite à pouvoir partir en quête de financements. Une fois cette phase crique franchie, nous pourrons développer notre technologie avec des professionnels, en l’occurrence du secteur des télécommunications.

- Nous réalisons l’entretien au 503, à l’occasion de l’inauguration de ses locaux rénovés. Quelles sont vos impressions ? Jalousez-vous vos camarades de Paris-Saclay ? Plus sérieusement, en quoi ces locaux vous paraissent-ils adapter à votre démarche d’entrepreneurs innovants ?

Paul Remazeilles : Pour commencer, je tiens à dire que le site de Bordeaux n’a rien à envier à celui-ci ! (Sourire). Le nôtre est aussi très agréable à vivre et nous y sommes bien accompagnés. Cela étant dit, reconnaissons que celui-ci a un avantage : c’est un site historique de l’Institut Optique. C’est là, au début des années 1980, qu’Alain Aspect a réalisé ses expériences qui devaient lui valoir le prix Nobel de Physique. Nous avons pu en bénéficier de cet environnement au cours de la première année – une année commune à l’ensemble des élèves ingénieur.e.s de l’Institut. Certes, c’était avant les travaux de rénovation. Mais nous avons pu déjà en apprécier l’âme. D’ailleurs, si la rénovation me paraît pleinement réussie, c’est parce qu’elle a su moderniser profondément le bâtiment, tout en préservant cette dernière. C’est dire si c’est agréable de travailler dans un environnement pareil, ce qu’il nous est possible de faire durant la semaine de rencontre entre les promos des différents sites. Nous avons aussi l’occasion de nous y rendre pour des événements plus ponctuels comme celui-ci. Au-delà du bâtiment, je souhaiterais aussi rendre hommage à la FIE : elle assure un réel accompagnement à travers des cours sur les différents aspects de l’innovation – son financement, le management de projet, la propriété industrielle… Sans elle, nous n’en serions sans doute pas là aujourd’hui.

Aboubakar Bayero : Après avoir entendu les discours des différentes personnalités qui se sont succédé (le maire d’Orsay, le vice-président de la Communauté d’Aglomération Paris-Saclay, la présidente de la Région Île-de-France, la secrétaire d’État à l’IA et au numérique), sur la symbolique du lieu, son rôle historique, etc., nous nous sommes faits, Paul et moi, la réflexion que cela nous plaçait, nous les élèves ingénieurs de l’Institut Optique et de sa FIE, un peu plus sous le feu des projecteurs : cela nous responsabilisait aussi, nous engageait.

- Cela étant dit, que dites-vous à ceux qui pourraient se demander si le 503 n’est pas devenu « trop beau » au regard du charme qu’il pouvait avoir avant, un charme évocateur de l’ambiance « garage » des pionniers de l’informatique et du numérique ? Tout en posant la question, je mesure l’intérêt de sa rénovation au regard de la nécessité pour les start-up de convaincre des investisseurs, en pouvant les accueillir dans de bonnes conditions, dans un lieu qui sache exprimer l’ambition et la réussite de celles qu’il héberge…

Paul Remazeilles : Le fait qu’autant d’investissements aient été consentis pour rénover le 503, ajouté à l’affluence enregistrée ce jour de l’inauguration, à la présence de nombreuses personnalités, dont Alain Aspect, resté présent toute la journée, témoigne de la confiance d’acteurs publics et privés en son avenir, en la réussite de ses entrepreneurs innovants. C’est un message qui, comme on l’espère, ne peut que convaincre d’autres investisseurs à investir dans les start-up issues de la FIE. Et on sait combien les investissements sont, aujourd’hui plus que jamais, nécessaires à l’amorçage, mais aussi à l’industrialisation de start-up DeepTech en général, de la photonique et du quantique en particulier…

- Et à les maintenir dans l’écosystème Paris-Saclay…

Aboubakar Bayero : Il est clair que le nouveau bâtiment 503 renforce la crédibilité des projets de start-up qui naissent de la FIE. Cela concourt à les « dérisker » aux yeux des investisseurs, et à susciter leur confiance comme le dit très justement Paul.

Paul Remazeilles : À cet égard, une statistique est intéressante à garder à l’esprit : la grande majorité des start-up qui sont sorties de l’Institut Optique, à l’issue donc du stage de fin d’études consacré à leur développement, sont encore en activité.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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