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Regard d’une étudiante paysagiste de Blois sur… le Plateau de Saclay.

Le 5 février 2016

Suite de nos échos à la journée de rencontre organisée le 26 janvier 2016, à la Ferme du Moulon, par Terre et Cité*, à travers le témoignage de Gabrielle Hillaire, une étudiante de l’Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage (ENSNP) de Blois, qui a réalisé pour l’occasion un poster scientifique sur… le Plateau de Saclay.

Pour accéder au précédent témoignage, celui de François Mancebo, cliquer ici.

– Vous êtes l’auteur du poster scientifique dédié au Plateau de Saclay, exposé au cours de la journée de rencontre de Terre et Cité. Comment en êtes-vous venue à le réaliser ?

Je suis actuellement étudiante en 5e année de l’Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage (ENSNP) de Blois, qui prépare, encore pour le moment, au titre d’ingénieur paysagiste. Pour les besoins de mon mémoire et de mon travail de fin d’études, je devais réfléchir à un projet d’aménagement sur un territoire de mon choix. J’ai choisi le Plateau de Saclay.

– Pourquoi ce choix ?

C’est un territoire que je connaissais pour m’y être déjà rendue. J’avais alors été frappée par deux de ses particularités : d’une part, cette forte présence agricole dans un tissu urbain particulièrement dense, celui de l’agglomération parisienne. D’autre part, la difficulté à le lire et à s’y repérer, malgré les grands marqueurs que peuvent être les différentes institutions qui s’y sont implantées. Je m’y étais d’ailleurs tout simplement perdue, en m’y promenant plus jeune. Du coup, j’ai voulu rendre compte de cette mixité d’espaces lisibles et d’autres plus complexes, composés de toutes ces enclaves constituées par les établissements d’enseignement supérieur et de recherche ou les centres de R&D de grandes entreprises.
Par ailleurs, forte des connaissances accumulées au cours de mes études à l’ENSNP de Blois, j’ai engagé, dans le cadre de mon mémoire, une réflexion sur les espaces périurbains au regard du concept d’identité territoriale. C’est ainsi que j’en suis venue à m’interroger sur le rôle possible de l’aménagement paysager dans la reconnaissance de qualités, qui ne se donneraient pas à voir de prime abord.

– Le périurbain connote d’ordinaire négativement. Votre travail vise-t-il donc à poser un autre regard, plus positif, sur ce type d’espace ?

Oui, d’autant plus que c’est un type de paysage que je connais bien. Avant de partir faire mes études à Blois, j’ai vécu depuis toute petite en banlieue parisienne. Pour autant, je n’étais jamais parvenue à définir précisément ce paysage dans lequel j’ai longtemps évolué. De là mon intérêt pour cette question de l’identité d’un territoire périurbain et de la manière dont elle pouvait passer par le paysage et la perception qu’en ont ses habitants.

– Et quel est donc le résultat de votre travail sur le Plateau de Saclay ? Comment en définiriez-vous le caractère périurbain ?

Le Plateau de Saclay présente selon moi au moins quatre caractéristiques. D’abord, son ouverture, grâce à la persistance de productions agricoles et notamment céréalières. Ensuite, l’influence des infrastructures construites au sud du Plateau. Nous sommes à l’évidence devant un territoire en mutation que ce soit du point de vue urbain ou agricole. C’est sa 3e caractéristique. Cela se lit d’ailleurs directement à travers les lignes de force, le développement de certains espèces végétales, qui sont différentes selon les endroits. Enfin, 4e caractéristique, c’est un territoire de frictions.

– C’est-à-dire ?

Il existe une tension entre ses composantes agricoles, particulièrement anciennes, et des éléments urbains. C’est un dialogue plus ou moins facile qui génère des formes paysagères diverses. Le tissu urbain proprement dit est disparate entre les zones pavillonnaires et d’habitat, d’une part, et ces enclaves que j’évoquais tout à l’heure, d’autre part. Sans compter les infrastructures routières qui accentuent le sentiment de fragmentation.
Après avoir été un territoire dédié principalement à la production agricole et même maraîchère, le Plateau de Saclay fut successivement investi par les établissements d’enseignement supérieur, les organismes de recherche, les entreprises et, plus récemment, par une population qui a des attentes différentes. Mais si cela suscite des frictions ou encore des conflits d’usage, cela crée aussi des potentialités de projets plus transverses.

– Y compris dans le domaine agricole ?

Y compris dans le domaine agricole. En témoigne la diversification des exploitations à laquelle on assiste depuis au moins une vingtaine d’années, avec la conversion d’agriculteurs au bio, le retour au maraichage, etc. Le tout dans une logique de circuit court pour se rapprocher des consommateurs du territoire.

– Comment avez vous procédé pour appréhender ce territoire ?

Je m’y suis rendue à plusieurs reprises en me laissant d’abord imprégner par les ambiances paysagères. Au moyen de croquis [à l’image de celui illustrant cet article], j’ai relevé ce qui m’apparaissait en être les grandes caractéristiques. Après cette étape de reconnaissance de terrain, je suis allée à la rencontre de ceux qui vivent et/ou travaillent sur le territoire pour mettre au jour le jeu d’acteurs. C’est ainsi que j’ai rencontré des représentants de la CAPS et des communes. Sans oublier Terre et Cité qui m’a aidée à prendre la mesure du poids des associations. Mon travail se poursuit. Si je suis là, aujourd’hui, c’est d’ailleurs pour glaner des informations complémentaires et entrer plus avant dans ce dialogue entre le territoire et ses acteurs.

– Un mot encore sur le poster scientifique exposé au cours de cette journée de rencontre de Terre et Cité…

Je l’ai conçu spécialement pour cette journée. Il récapitule mon travail de mémoire, en déclinant le diagnostic en quatre parties : la formation du socle ; la perception et les valeurs du territoire ; la mosaïque des paysages et, pour finir, des éléments de réflexion sur le devenir de ce territoire périurbain. Il sera complété en juin prochain par une douzaine d’autres posters, qui exposeront, eux, les propositions en termes d’aménagement paysager.

– Ce travail vous a-t-il donné envie de quitter Blois pour vous installer ici ?

(Rire) Quitter Blois ? Ce ne sera pas simple tant le cadre de vie y est agréable ! Cela dit, je peux concevoir l’idée de m’installer un jour sur le Plateau ou ses environs. C’est un territoire que j’ai apprécié fréquenter. Maintenant que j’en comprends les rouages, j’aimerais y poursuivre mes réflexions. La dimension scientifique qui s’y développe, notamment au travers des journées comme celle-ci est enthousiasmante. Et puis l’approche paysagère y a un rôle à jouer, en faisant le lien entre les projets en cours.

* Journée organisée en prévision des Ateliers de Saclay, programmés du 23 au 26 mai prochain, en vue de « réunir une trentaine de chercheurs de haut niveau pour un travail approfondi d’analyse du fonctionnement de la région agricole et naturelle du plateau de Saclay. Ce travail vise à faire émerger des outils de gestion et de connaissance du territoire à destination notamment des partenaires institutionnels. Il permettra également d’identifier des pistes de progrès dans la gestion de la petite région agricole et naturelle » (d’après Terre et Cité). Pour en savoir plus et s’inscrire, cliquer ici.

Crédit de la photo en Une, grand format : Marion Bruère – Terre et Cité.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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