Suite de nos échos à la 3e édition de Handiversité à travers le témoignage de João Neto, un doctorant brésilien de l’Université Paris-Saclay, par ailleurs professeur à l’Université Fédérale do Recôncavo de Bahia, qui poursuit une thèse sur le thème de la smart city inclusive.
– Si vous deviez, pour commencer, par pitcher votre sujet de recherche ?
Il s’agit de réfléchir à l’amélioration des conditions de l’expérience urbaine des personnes en situation de handicap. Je pars de l’hypothèse que les technologies mobilisées dans la perspective de la smart city peuvent y contribuer en renforçant chez ces personnes le sentiment d’autonomie et d’indépendance.
– Un sujet on ne peut plus ambitieux ! Comment le traiter dans le cadre d’une thèse ?
Je m’appuie sur une méthodologie consistant à procéder en deux temps. En premier lieu, je m’attache à identifier les obstacles que rencontrent les personnes vivant avec un handicap, dans l’espace urbain, et leurs besoins. Dans un second temps, je mets en avant des réponses possibles sur le plan aussi bien théorique que technologique et ce, à l’attention des développeurs et ingénieurs, mais aussi des pouvoirs publics locaux. C’est dire encore si le sujet est ambitieux, mais j’ai la conviction qu’on ne peut pas séparer les enjeux proprement technologiques des enjeux politiques.
– Menez-vous cette recherche sur la base de terrains d’étude ?
Oui. J’étudie ce qui se fait dans diverses municipalités brésiliennes, en échangeant avec des personnes impliquées dans les questions du handicap.
– Quel regard posez-vous sur cette notion de smart city ?
Cette notion est précisément au cœur de ma réflexion. Beaucoup de gens fondent des espoirs sur les nouvelles technologies du numérique pour améliorer la qualité de vie des habitants. Mais force est de constater que ces technologies ne bénéficient pas à toute la population, à commencer par les personnes vivant avec un handicap. C’est d’ailleurs ce constat qui a servi de point de départ de ma thèse et qui m’a incité à réfléchir à la manière dont on pourrait faire profiter ces personnes du concept de smart city en faisant de celle-ci une ville non seulement intelligente, mais aussi « inclusive ». Pour mener à bien ma thèse, je ne suis pas seul. J’échange aussi avec le Groupe de travail (GT) handicap de l’Université Paris-Saclay, qui mobilise des experts couvrant un large spectre de compétences et de savoirs, y compris en sciences humaines.
– Comment en êtes-vous venu à faire une thèse à l’Université Paris-Saclay ? Est-ce dû à l’attractivité de l’écosystème ?
En fait, quand je suis arrivé ici, sur le Plateau de Saclay, j’ignorais qu’il était l’objet d’un tel projet d’aménagement ! Je n’avais fait que répondre à un appel à propositions Erasmus +. Ce n’est qu’une fois sur place que j’ai découvert tous ces dispositifs de recherche et d’innovation autour du handicap. Mon plaisir à y poursuivre ma thèse n’en a été que plus grand. C’est l’endroit rêvé pour en faire une sur le handicap.
– Envisagez-vous votre travail dans une perspective comparative ?
Oui, même si cela n’est pas simple tant les situations sont variables d’un pays à l’autre, sans que le niveau de développement ne soit toujours déterminant. Des villes de pays émergents peuvent paraître plus développées au regard des questions de handicap. Je pense en particulier à São Paulo, où les stations de métro sont toutes équipées d’ascenseurs pour faciliter la mobilité des personnes ayant un handicap. Nous en sommes encore loin, ici, sur le Plateau de Saclay, où n’existe pas encore de métro. Mais ce n’est pas pour cela que le niveau d’expertise y est moindre. Au contraire.
– Quel regard posez-vous sur Handiversité ? En quoi était-ce important pour vous d’y participer ?
J’ai pu y montrer mon travail dans le cadre d’un stand mis à disposition dans l’espace dédié aux projets de recherche et d’innovation, échanger ainsi avec des personnes travaillant dans le même domaine, découvrir leur propre travail ou initiative. Voyez comme je suis bien entouré avec, d’un côté, la présentation d’un simulateur de fauteuil roulant (étant informaticien de formation, je m’intéresse particulièrement aux problématiques d’interface) et, de l’autre, un projet de traduction de messages en langage de signes à partir de vidéos. Des exemples parmi d’autres qui témoignent de l’effervescence de la recherche et de l’innovation, ici, à Paris-Saclay. Je retourne au Brésil dès après-demain, d’autant plus motivé à achever ma thèse !
A lire aussi les entretiens avec Alain Schmid, ingénieur chercheur, en charge du projet « Coordination Handicap » au sein d’EDF (pour y accéder, cliquer ici) ; Samuel Marie, tétraplégique, qui a entrepris «Sam Fait Rouler », le premier Handi Road Trip pour un monde accessible (cliquer ici) ; enfin, Estelle Peyrard, doctorante, qui poursuit une thèse en convention Cifre, associant l’Association des Paralysés de France (APF) et l’Institut interdisciplinaire de l’Innovation (cliquer ici).
Journaliste
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