Apis, un mot latin qui suggère l’univers de la ruche. Un nom approprié pour cette pépinière installée dans des locaux entièrement rénovés en 2009, au sein du parc d’activités de Courtabœuf, et qui peut accueillir plusieurs dizaines d’entreprises. Son directeur, Olivier Fraudeau, nous en dit plus sur sa vocation et les perspectives offertes par la dynamique Paris-Saclay, qui, insiste-t-il, ne saurait s’incarner qu’au travers de start-up et d’entreprises innovantes.
– Si vous deviez pitcher Apis Développement…
Apis Développement est une structure de soutien à l’entrepreneuriat local, généraliste au sens où elle accueille tout type d’entreprises, du moins dans la mesure de ce qu’on peut leur offrir, à savoir : un immobilier de bureau, pour l’essentiel. Nous avons la chance d’être dans un bâtiment acquis par la collectivité (la commune de Villebon-sur-Yvette), et complètement réhabilité il y a moins de dix ans. Ces bureaux que nous proposons sont de qualité, offrant un confort de travail équivalent à celui que nos entrepreneurs ont pu connaître du temps où ils étaient cadres dans une grande entreprise : connectés et modulaires, les bureaux sont climatisés. A quoi s’ajoutent des salles de réunion et des équipements mutualisés (réseaux, bureautique, impressions…). Comme les autres pépinières, nous proposons en plus des bureaux, des services mutualisés et du conseil.
– Faites-vous bénéficier ces entreprises d’un accompagnement ?
Oui, bien sûr, c’est ce qui constitue la valeur ajoutée d’une pépinière. Nous prodiguons des conseils aux jeunes entrepreneurs comme aux plus chevronnés. Ces conseils en matière d’emplois, de protection juridique ou de gestion financière sont individualisés ou collectifs. Ils sont assurés par l’équipe d’animation de la pépinière, par des partenaires qui assurent des permanences ou par des prestataires extérieurs, dans le cadre de conférences sur diverses thématiques. A titre d’exemple, la dernière portait sur la sécurité des données de l’entreprise.
– Un sujet ô combien d’actualité…
Oui, en effet. Cette conférence a eu lieu entre les deux cyberattaques intervenues ces derniers mois [WannaCry et NotPetya]…
– Combien d’entreprises pouvez-vous accueillir ?
En théorie, nous pourrions en accueillir 70, soit le nombre de bureaux dont nous disposons, les surfaces démarrant à 13 m2. Je dis « en théorie » car une même entreprise peut en occuper plusieurs. Les cloisons étant modulables, nous pouvons adapter les surfaces en fonction du besoin de l’entreprise. Actuellement, nous comptons 36 entreprises, qui totalisent 80% des surfaces.
– Qu’en est-il des baux ?
Nous nous sommes calés sur la règle Afnor, suivant laquelle une pépinière doit pouvoir accueillir une entreprise pendant au maximum quatre ans. Pour ce faire, nous avons fait le choix de proposer un contrat de deux ans renouvelable une fois, si l’entreprise le souhaite et si nos relations sont telles que nous le souhaitons aussi ! Moyennant un préavis de trois mois, l’entreprise conserve toujours la possibilité de partir avant échéance.
– Quel type d’entreprises accueillez-vous ?
Nous sommes installés dans un immeuble de bureaux, sans surfaces de stockage, ce qui exclut a priori les entreprises du commerce, de l’artisanat ou ayant besoin de logistique. Mais, hormis ces entreprises, nous ne privilégions aucun secteur en particulier : nous pouvons accueillir aussi bien des entreprises innovantes, technologiques que des entreprises de conseils, de négoces ou des bureaux d’étude.
– Veillez-vous à ce qu’il y ait une diversité ou assumez-vous le risque qu’il y ait un secteur surreprésenté ?
Un tel risque est peu probable, car nous nous imposons une autre règle, à savoir : ne jamais accueillir deux entreprises susceptibles d’être concurrentes. Cela poserait des problèmes de voisinage et, pour nous, qui intervenons comme conseil, des problèmes de confidentialité : nous avons a priori accès aux données relatives aux entreprises que nous hébergeons. Cela étant dit, force est de constater une dominante : la plupart des entreprises que nous accueillons actuellement sont dans les services B to B.
– Parmi les entreprises que vous avez accueillies, certaines ont-elles percé ?
(Sourire). Si votre question est de savoir si nous avons enregistré des Licornes, la réponse est non, pas encore ! Cependant, je peux citer au moins deux beaux succès. Le plus récent est le site delamaison.com, qui a été créé il y a moins de dix ans dans nos murs. Comptant de l’ordre de 200 salariés (dont une partie sur son site logistique de Villejust), il a depuis été racheté par la maison mère de Leroy Merlin. Auparavant, il y eut Alcea,une société qui développe des systèmes de sécurité et de contrôle d’accès, vendus dans le monde entier et qui vient de se réinstaller sur le parc d’activités de Courtabœuf, à quelques centaines de mètres d’ici, dans des locaux de 4 000 m2, avec ses 150 salariés.
– En quoi le fait d’être implanté dans le parc d’activité de Courtabœuf ajoute à la particularité d’Apis Développement ?
La localisation au sein de ce parc d’activités comporte plusieurs aspects positifs. Rappelons qu’il s’agit d’un des plus importants parcs d’activités européens : il concentre 25 000 emplois et sa notoriété a dépassé les frontières. Une partie des entrepreneurs qui nous rejoignent le font en connaissance de cause, pour avoir déjà travaillé sur le parc d’activités. C’est donc un environnement qui leur est familier. Leur intégration se fait d’autant plus facilement. Nombre de nos entrepreneurs habitent plus au sud en Essonne, voire dans les Yvelines. En s’implantant ici, ils sont assurés d’être au contact de leurs clientèles. J’ajoute que nous sommes à la limite sud de l’agglomération parisienne : on peut donc venir jusqu’ici en voiture ou par les transports en commun depuis Paris, sans voir autre chose que des bâtiments – de logements ou d’activités. Mais sitôt qu’on va un peu plus au sud, sur l’A10, on peut se sentir à la campagne. La localisation est d’autant plus intéressante que le parc d’activités a finalement été reconnu comme une pièce maîtresse de l’OIN Paris-Saclay. Aujourd’hui, la marque Paris-Saclay est clairement un facteur d’attractivité, en plus de la marque Courtabœuf.
– Est-ce à dire que pour les entreprises que vous accueillez, Apis Développement est une porte d’entrée dans l’écosystème de Paris-Saclay ?
Je distinguerai celles qui sont présentes sur le marché national de celles qui ont un business local. Pour ces dernières, Paris-Saclay est une zone à prospecter de première importance. Elle offre l’assurance de trouver une clientèle potentielle. Ces mêmes entreprises ont bien conscience qu’une pépinière comme Apis Développement est une bonne façon de se connecter à l’écosystème. C’est aussi notre métier que de les aider à le faire, comme de les mettre en contact avec les réseaux de financement et de soutien à l’entrepreneuriat innovant. Vous avez pu constater que l’écosystème francilien est extrêmement riche à cet égard et peut-être même trop riche – il est parfois difficile d’y voir clair pour un entrepreneur débutant. Cependant si nous faisons désormais partie de Paris-Saclay, nous ne sommes pas à proximité immédiate du RER B ni de la future ligne 18. Peut-être un téléphérique nous y reliera-t-il un jour ?
– L’accessibilité par les transports n’a-t-elle pas connu des améliorations ?
Si, reconnaissons-le. La réorganisation du pôle multimodal de Massy-Palaiseau a déjà constitué un progrès. Le parc d’activités est désormais plus facilement accessible en bus.
– Je peux en témoigner pour être venu jusqu’à vos bureaux par le bus 22…
Vous avez donc pu voir combien cela était pratique : il arrive à 300 m de notre bâtiment. Certes, des choses peuvent encore être améliorées. Elles le seront avec le bus en site propre – je sais que les pouvoirs publics y travaillent. L’accessibilité routière gagne cependant à être encore améliorée. Les accès ne sont pas à la mesure du nombre d’emplois que concentre le parc d’activités : ils ne sont pas assez nombreux ni commodes. Les entreprises attendent beaucoup du réaménagement du fameux Ring des Ulis, une opération qui demandera encore du temps, mais qui est désormais actée et financée.
– Encore un mot sur ce parc d’activités dont on ne peut qu’être impressionné par la richesse des entreprises qui s’y trouvent – rien que les 300m séparant la station de bus et votre bâtiment en donnent un aperçu…
Il y en a en effet de toutes sortes : de très grandes – comme par exemple HP France, qui y a son siège ou encore JM Bruneau – des PME – aussi bien dans les services, la logistique et l’industrie, dont quelques-unes leaders dans leurs secteurs respectifs ; je pense en particulier à Castolin [qui propose des solutions industrielles pour l’assemblage et la maintenance par soudage, brasage et techniques connexes comme la projection thermique] – enfin, de nombreuses TPE.
– Pour autant, on ne ressent guère un effet « cluster ». Les entreprises ne semblent pas avoir développé beaucoup d’interactions, repliées qu’elles sont derrières leurs grilles…
Le parc d’activités de Courtabœuf a été conçu dans les années 70. Il porte aujourd’hui le poids des années. Beaucoup d’entreprises en sont parties, mais c’est la vie des affaires qui le veut. Et puis, elles ont été remplacées par d’autres. Le départ de Microsoft, qui a commencé son activité en France, ici-même, ne doit pas faire oublier que son immeuble est aujourd’hui occupé par une division de General Electric. Ce renouvellement permanent est bien la preuve de la vitalité du parc, comme d’ailleurs son extension en cours à l’est de l’A10. Est-ce que tout cela constitue un ensemble cohérent, dans lequel on interagit ? Force est de reconnaître que toutes les entreprises sont loin d’échanger au-delà de leurs voisins immédiats. Peut-être faute de lieux adaptés ou d’événements. Sans doute y a-t-il aussi des efforts à faire à ce niveau. Mais ce mouvement est déjà engagé : l’Adezac [Association des chefs d’entreprise du Parc de Courtabœuf] est revenue au devant de la scène et contribue à ouvrir le parc sur le reste du Plateau de Saclay.
– On y trouve aussi peu de lieux de restauration…
Il y en a plus qu’on ne le croit, mais il faut les connaître : la plupart sont en pied d’immeubles d’activités. Plus fondamentalement, c’est à la création de centralités qu’il convient de s’atteler. Malgré ses 300 ha, le parc ne compte aucun centre identifié comme tel, avec une offre de services dignes de ce nom. Figurez-vous que malgré les 25 000 salariés qui y travaillent, on n’y recense aucun distributeur de billets… Une situation problématique dont la Communauté Paris-Saclay (qui a la compétence sur les zones d’activités) a cependant bien conscience. Elle travaille à définir une ou plusieurs centralités au sein du parc, dont probablement au niveau de l’ancienne ferme de Courtabœuf.
– Revenons-en à Apis Développement, qui s’inscrit par ailleurs dans un réseau de pas moins de quatre pépinières…
Oui, un ensemble de pépinières, en cours de réorganisation suite à la réforme territoriale ayant donné naissance à la Communauté Paris-Saclay. Jusqu’alors, Apis Développement était l’unique pépinière d’Europ’Essonne. Depuis la fusion de cette communauté avec la CAPS, qui était plus richement dotée en pépinières (elle en comptait trois, situées à Gif-sur-Yvette, Orsay et Palaiseau, près de la ligne B du RER). Avec le service du développement économique et les élus de la nouvelle Communauté d’agglomération, nous avons réfléchi à la manière dont nous pourrions utiliser cette richesse et être plus performants vis-à-vis des entrepreneurs. La décision d’une fusion entre les pépinières au sein d’une même structure a d’ores et déjà été inscrite dans le Projet de territoire de l’agglomération. Mais la communauté d’agglomération souhaite aller plus loin : il ne s’agit pas de gérer simplement l’existant, mais de se doter d’un outil qui serait en mesure de coordonner ussi les futurs lieux que l’agglomération pourra mettre à disposition des entrepreneurs comme, par exemple, cet espace de coworking, qui va s’installer à Massy, dans les anciens locaux d’Europ’Essonne.
– Nouvelle organisation dans laquelle vous êtes très impliqué …
Oui, je suis en charge de la coordination du projet. Naturellement, je travaille étroitement avec les autres pépinières et avec l’ensemble des services de l’agglomération. Début 2018, nous allons proposer aux entrepreneurs une structure unique et nouvelle qui, tout en préservant les sites existant, pourra s’ouvrir à d’autres sites.
– S’agit-il d’offrir la possibilité à ces entrepreneurs de changer de pépinières en fonction de leur marché ou des besoins rencontrés au fil de leur développement ?
En principe, cette éventualité est déjà envisageable et le restera. Dans la pratique, cela se fait très peu car les entrepreneurs choisissent leur lieu d’implantation en fonction de leur projet, de son intérêt pour leurs salariés au regard de son accessibilité – on y revient – sans compter leur propre lieu d’habitation. Les nouveaux services que nous souhaitons apporter ne concernent donc pas tant la mobilité de l’entreprise au sein du réseau, d’un site à l’autre, que la création d’une communauté d’entrepreneurs qui, pour le moment, n’existe pas. Communauté dont pourront faire partie les entreprises actuellement hébergées dans l’un ou l’autre de nos sites (soit une centaine au total), mais également anciennement hébergées ou celles, encore, qui n’y sont que domiciliées. Soit un ensemble, cette fois, de quelque 300 entreprises.
– En jouant en somme sur un effet Alumni ?
Oui, c’est bien l’esprit !
– Quelles actions concrètes comptez-vous mettre en place ?
D’ores et déjà nous incitons nos entrepreneurs à découvrir les autres sites en alternant les lieux où nous organisons les actions d’animation – conférences et séminaires – ou encore les permanences qu’y font nos partenaires. Ainsi, des entrepreneurs de Palaiseau sont venus assister à notre dernière conférence sur la cybersécurité, à Villebon-sur-Yvette. En novembre, nous organisons un « speed business meeting » entre les entrepreneurs de toutes les pépinières.
– Venons-en à vous. Connaissiez-vous le parc d’activités avant de prendre la responsabilité d’Apis développement ?
Oui, et même le territoire que ce fut avant ! Je suis né à Orsay, à l’époque où le parc d’activités de Courtabœuf n’était que des champs dans lesquels vaches er bœufs paissaient. J’ai ainsi connu la ferme de Courtabœuf sans aucun autre bâtiment autour. Ensuite, j’ai fait ma scolarité sur ce même territoire – j’ai eu le bonheur de passer trois années d’études sur le campus d’HEC à Jouy-en-Josas (je suis de la promo 1984). Mon arrivée à Apis Développement a donc été un peu un retour aux sources.
– Qu’est-ce qui, au plan professionnel, vous a prédisposé à occuper cette fonction ?
J’ai une longue expérience de la gestion et de la création d’entreprise. J’ai commencé ma carrière professionnelle au sein de grosses PME du secteur informatique, à des postes de direction commerciale, marketing, communication,… Puis j’ai quitté cet univers pour créer ma propre boite, en 1997, une société spécialisée dans le recyclage de matériel informatique, en l’occurrence des cartouches d’imprimantes laser. Une activité somme toute banale aujourd’hui, mais qui ne l’était pas il y a encore vingt ans. Elle m’a beaucoup intéressé pour les process, les savoir-faire et compétences techniques qu’elle mobilisait et ce, dans de nombreux domaines – l’optique, l’électronique ou encore la chimie. Un métier de petite industrie assez complexe au final et en cela intéressant, qui implique aussi des circuits d’approvisionnement particuliers.
– L’exerciez-vous sur le territoire de Paris-Saclay ?
Oui. Dans un premier temps, nous disposions d’ateliers dans l’enceinte de l’aéroport de Toussus-le-Noble puis au hameau de Villaroy, située près du Technocentre de Renault. Ce fut plutôt une belle aventure – elle a durée huit-neuf ans et nous avions recruté jusqu’à une quinzaine de personnes. Mais j’ai préféré y renoncer suite à un désaccord avec un associé, comme il peut y en avoir dans toute aventure entrepreneuriale. J’avais cependant pris goût à la création entrepreneuriale, au point de ne plus avoir forcément envie de retourner dans une entreprise pour me retrouver sous la direction d’un « patron ». Pendant trois ans, je me suis consacré au conseil en création d’entreprise. A cette époque, pour le compte de l’Afpa de Ris-Orangis, j’ai monté et animé des programmes de formation destinés aux créateurs d’entreprise, avec différents partenaires, dont la CCI de l’Essonne. C’est à l’occasion d’un de ces partenariats que j’ai découvert l’univers des pépinières d’entreprises, dont Apis Développement, qui intervenait dans nos programmes de formation et dans le conseil. En m’intéressant d’un peu plus près à ces structures, je me suis vu proposer de prendre en charge l’animation de P3MIL, le réseau des pépinières d’entreprises d’Ile-de-France, qui rencontrait alors des difficultés dans son fonctionnement. Ma mission a donc été d’en rétablir la situation. Un challenge qu’il ne me déplaisait pas de relever. J’y suis parvenu en gardant un bon souvenir de cette expérience, qui aura duré trois ans : cette structure m’aura permis d’être en relation avec pas moins d’une quarantaine de pépinières, mais également les réseaux nationaux ou encore les acteurs de la création d’entreprises, sans oublier la Région Ile-de-France elle-même, un acteur de premier plan (à défaut d’intervenir dans le fonctionnement des pépinières, elle en finance la construction ou la réhabilitation des bâtiments).
C’est tout naturellement que le poste d’Apis Développement s’étant retrouvé vacant, que j’ai proposé mes services : j’avais vu comment fonctionnaient les pépinières au plan régional ; je souhaitais désormais revenir au contact des créateurs d’entreprises, remettre les mains dans le cambouis, en somme. Je suis arrivé à Apis Développement au début de l’année 2012, du temps où Dominique Fontenaille, maire de Villebon-sur-Yvette, en était président. J’ai eu grand plaisir à travailler avec lui. Son successeur est un autre élu, M. Trickovski (maire-adjoint de Villejust). C’est l’occasion pour moi de souligner l’importance de l’ancrage territorial de notre structure.
– Le fait de vous retrouver ainsi au contact d’entrepreneurs ne vous donne-t-il pas envie de vous relancer dans la création d’entreprise ?
(Sourire). Ma préoccupation actuelle est d’abord de remplir au mieux la mission que l’on m’a confiée : accompagner les entrepreneurs qui nous font l’honneur de rejoindre Apis Développement. Je m’emploie d’autant plus à la remplir qu’elle vous préserve du risque de tomber dans la routine. Deux projets ne se ressemblent pas. Les suivre dans leur développement est d’autant plus stimulant. Est-ce que cela n’en maintiendrait pas moins l’envie de reprendre le chemin de la création ? Oui, clairement. Chaque fois qu’un projet démarre, on éprouve forcément une certaine excitation. A fortiori, quand il réussit. Certes, certains échouent, mais l’échec est inhérent à la démarche entrepreneuriale. Il permet de rebondir sur d’autres projets. Cela étant dit, j’ai peut-être aussi un peu passé l’âge ! Je suis plus enclin à croire à la transmission : j’ai des enfants, qui sont maintenant de la génération des startuppers, et qui manifestement aimeraient franchir le pas, en se disant que leur père pourra toujours les aider ou les conseiller. Ce n’est pas faux !
– Revenons-en à Paris-Saclay et à sa dynamique en faveur de l’entrepreneuriat innovant. Partagez-vous le sentiment que cette dynamique est bel et bien enclenchée ?
Oui, elle l’est assurément. La volonté de l’Etat de bâtir, avec les collectivités locales concernées – Région, Départements, Agglomérations, Communes – un cluster d’excellence mondiale en y concentrant des moyens de recherche et d’innovation, en y favorisant aussi la création et le développement de start-up, est bien réelle. Les parties prenantes communiquent de plus en plus entre elles. De nouveaux bâtiments sont déjà sortis de terres, d’autres doivent le faire… Mais gardons à l’esprit que le cluster concerne au premier chef les étudiants, les chercheurs, les entrepreneurs tournés vers les nouvelles technologies. Or Paris-Saclay, c’est aussi un tissu de TPE-PME, moins orientées vers la recherche et l’innovation, mais qui n’en répondent pas moins aux besoins des habitants. De là l’importance de structures comme la nôtre, qui assurent un accompagnement à ce type d’entreprises. Loin de moi d’opposer ces deux facettes de Paris-Saclay. Elles sont au contraire complémentaires. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, nous bénéficions d’ailleurs de l’effet d’image de Paris-Saclay et j’espère que nous bénéficierons aussi des infrastructures de transport, à commencer par la ligne 18 du métro du Grand Paris. Il reste que nous participons d’une autre réalité de Paris-Saclay, qu’il importe de prendre en considération. Les entrepreneurs que nous accueillons ici ne sont pas nécessairement sortis de Grandes Ecoles – en tout cas pas hier. Ce sont majoritairement d’anciens cadres d’entreprises en reconversion qui ont des projets tout aussi légitimes et qui ont même peut-être plus de chance de succès (le taux de réussite des start-up est a priori plus faible que celui d’entreprises « classiques »). Est-il besoin de rappeler qu’elles contribuent tout autant si ce n’est plus à la création d’emplois locaux ? Je tiens aussi à souligner le rôle du milieu associatif. Nous accueillons d’ailleurs plusieurs de ses acteurs majeurs dans nos locaux. Je pense à Atout PLIE, une association d’insertion pour les personnes éloignées de l’emploi.
Bref, Paris-Saclay, ce n’est pas qu’un grand cluster ni un grand campus universitaire. C’est aussi un tissu d’entreprises et d’associations, qui doivent pouvoir y trouver leur place et être reconnues comme des contributeurs au développement local.
– Nous pourrions clore cet entretien sur ces mots…
Oui. Mais il y a une question que vous ne m’avez pas posée et que pourtant on me pose souvent…
– De quoi s’agit-il ?
Est-ce que le fameux l’Incubateur-Pépinière-Hôtel d’Entreprises (IPHE) de Paris-Saclay ne sera pas un redoutable concurrent pour nous ?
– Et la réponse à votre question, quelle est-elle ?
C’est bien évidemment non : il est complémentaire. Car la vocation de cet IPHE est d’héberger des projets et des entrepreneurs issus de l’écosystème innovant de Paris-Saclay, autrement dit de ses établissements de recherche et d’enseignement supérieur en plus de la SATT Paris-Saclay et d’IncubAlliance. C’est du moins ce qui a été décidé. Il n’a pas été configuré ni financé pour accueillir des entreprises auxquelles s’adressent d’ordinaire les pépinières. Il n’y a donc pas lieu de craindre une concurrence. Sauf, à la marge, pour notre pépinière de Palaiseau, qui est plus orientée vers les entreprises innovantes. Mais rappelons que nous sommes sur un grand territoire, qui compte de nombreuses créations d’entreprises : 3 200, rien que sur l’agglomération Paris-Saclay, en 2016, pour une capacité d’accueil en pépinière d’une centaine d’entreprises, qui peuvent y rester jusqu’à quatre ans. C’est dire la marge de progression dont nous disposons.
Pour en savoir plus sur Apis Développement : www.apisdeveloppement.com/
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