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Agriculture & Alimentation

« On ne vient pas par hasard à La Table de Cana »

Le 10 juin 2025

Entretien avec Hélène Lett

On connaissait cette entreprise d’insertion à travers sont activité de traiteur. Quelle ne fut pas notre surprise en découvrant qu’elle s’était vue confier le point de restauration du Lumen ! Forcément, nous avons voulu y voir de plus près et même en savoir plus en interrogeant des membres de l’équipe. Lesquels se sont prêtés de bonne grâce à l’exercice, à commencer par Hélène, la responsable du lieu, et au parcours on ne peut plus atypique…

- Si, pour commencer, vous deviez définir La Table de Cana… ?

Hélène Lett : La Table de Cana est entreprise d’insertion sociale et professionnelle par les métiers de la restauration, de personnes qui ont été éloignées de du marché du travail. Elle a été créée il y a quarante ans, en 1985, à l’initiative de Franck Chaigneau, un prêtre jésuite et cadre informatique, à l’attention des SDF d’Antony. Depuis la structure a essaimé en France, à Marseille, Gennevilliers, Lyon, Montpellier, etc. Elle compte plusieurs grandes entreprises parmi ses clients et ses soutiens. Depuis quelques années, Table de Cana Antony a développé des points de vente, principalement dans des musées ou institutions et lieux culturels – entre autres exemples, nous sommes présents à l’Institut du Monde arabe, au Musée de Cluny – ou encore sur les berges de la Seine. Le Plato est le tout dernier lieu de restauration ouvert.

- Avant d’y venir, un mot sur vos salariés en insertion ?

H.L. : Nous les formons aux différents métiers de la restauration pour une durée de deux ans maximum. Selon le profil et la demande du salarié en insertion, nous développons une compétence spécifique dans la pâtisserie, la « cuisine chaude » et ou encore les « Petites pièces traiteur », sans oublier le métier de plongeur, qui, contrairement, aux apparences, exige de réelles compétences compte tenu des exigences en matière d’hygiène. Ici, au Plato, nous formons des EDR – employés de restauration – les plus polyvalents possibles de façon à ce qu’ils puissent postuler auprès d’un large spectre d’entreprises.

- Est-il besoin de le préciser ? Pour être une entreprise à vocation sociale, la Table de Cana n’en est pas moins regardante sur la qualité y compris gustative des produits proposés…

H.L. : En effet ! Nous accordons beaucoup d’importance au « rendu client » : ce n’est pas parce que nous faisons l’effort d’accompagner des personnes en insertion qu’on se montre moins exigeants sur la qualité. Certes, il nous faut davantage de salariés que dans une entreprise « normale », qui, elle travaille avec des salariés qualifiés. Les nôtres ayant été éloignés de l’emploi, ont parfois besoin de temps pour retrouver des automatismes. La qualité pour le client n’en doit pas moins être parfaite. La Table de Cana est une entreprise, qui engage sa réputation.

- Vos salariés eux-mêmes paraissent y accorder beaucoup d’importance : on les sent investis dans ce qu’ils font…

H.L. : De fait, et cela est vrai de l’ensemble des salariés. Pour l’encadrement, comment ne pas être fier de participer à un tel projet ? On ne vient pas par hasard dans une entreprise d’insertion comme La Table de Cana. On y vient pour participer à un projet socialement responsable. Pour les salariés en insertion, c’est une opportunité de montrer de quoi ils sont capables, de regagner de la confiance en eux.

- « On ne vient pas dans une entreprise d’insertion par hasard » venez-vous de dire. Vous-même, qu’est-ce qui vous a motivée à rejoindre l’aventure de la Table de Cana ?

H.L.: Avant de la rejoindre, j’ai eu plusieurs vies professionnelles. Mon cursus, je l’ai entamé dans le secteur de l’aide au développement agricole en Afrique. Ensuite, j’ai travaillé dans l’accompagnement d’entreprises dans la gestion de l’environnement avant de faire, arrivée à la quarantaine, une conversion professionnelle dans un tout autre domaine : la pâtisserie ! J’ai enchainé diverses expériences dans la restauration en commençant par créer mon propre restaurant avant d’intégrer, le temps de parfaire mes compétences, la restauration collective. Ma dernière expérience en date dans ce domaine s’est déroulée à la Prison de la Santé où j’ai travaillé pas moins de cinq années jusqu’à la fin 2024. J’y avais créé des ateliers de cuisine avec des détenus. Ces ateliers m’ont rappelé combien il était important de travailler sur un projet qui ait socialement du sens. Ils m’ont aussi confortée dans l’idée de trouver un métier qui concilie toutes mes préoccupations tant au plan social qu’environnemental, et toujours dans la restauration. Car je trouve qu’il y a là dedans quelque chose de fédérateur.

- On comprend donc votre présence à la Table de Cana, mais comment s’est faite la connexion avec elle ?

H.L. : Dans ma prospection, je l’ai rapidement repérée. Je me suis aussitôt retrouvée dans sa démarche et ses initiatives, une en particulier : le chantier d’insertion, à Marseille, au sein de la prison des Baumettes, et qui a pour nom les « Beaux Mets ». Quand j’ai découvert cette initiative, j’ai aussitôt pris contact avec la Table de Cana et me voilà maintenant au lieu de restauration ouvert tout récemment, en mars 2025, dans le quartier de Moulon, au rez-de-chaussée du Lumen…

- On imagine que votre profil ne pouvait qu’intéresser la Table de Cana, dans la perspective de l’ouverture du Plato…

H.L. : Cela a été une belle rencontre, effectivement.

- Quelles ont été vos premières impressions en découvrant le lieu, ses alentours ? Connaissiez-vous déjà le territoire ?

H.L. : Oui, car petite, j’habitais dans les environs du plateau de Saclay. Mais je n’y étais pas revenue depuis très longtemps. Quelle surprise fut la mienne quand je m’y suis rendue pour rejoindre Le Plato. J’étais complètement perdue tellement le territoire avait changé. Son développement est proprement impressionnant. Quant à notre lieu, la première fois que je l’ai vu, il était encore en travaux. Le résultat est là encore impressionnant : l’espace est grand, lumineux : grâce aux baies vitrées, on bénéficie du spectacle de la végétation. Le Patio est accueillant. Que dire du Lumen, un bâtiment magnifique !
Quant au public, j’en apprécie la mixité : parmi nos clients, on compte aussi bien des étudiants de toutes nationalités – ce qui me vaut le plaisir de parler parfois anglais ou espagnol – des enseignants, des personnels administratifs.

- Comptez-vous déjà des « habitués » ?

H.L. : Oui, et j’en ai un bon exemple devant moi [rire]. D’autres personnes viennent plusieurs fois par semaine, qu’on commence à reconnaître et même connaître. À quoi s’ajoutent des personnes qui viennent pour découvrir – nous ne sommes ouverts que depuis quelques semaines. Nous en saurons donc plus d’ici quelque temps. Il est pour l’heure encore trop tôt pour dresser un bilan.

- Pour ma part, je peux témoigner du fait d’y faire l’expérience de la promesse contenue dans le projet d’aménagement d’un cluster scientifique et technologique, à savoir celle de la sérendipité : pouvoir y faire d’heureuses rencontres avec des personnes qu’on gagne à connaître ou qu’on connaît déjà mais qu’on n’avait pas projeté de recontacter… Ici, j’ai croisé des personnes que je désespérais de revoir, faute de parvenir à caler un rendez-vous…

H.L. : Ce que vous dites-là me plaît beaucoup. D’ailleurs, parmi les réponses que nous avons recueillies à travers un questionnaire que nous soumettons à nos clients…

- Questionnaire que j’ai rempli !

H.L. : Comme vous avez donc pu le voir, une des questions porte sur ce que le client aime trouver dans ce lieu, et parmi les réponses possibles, nous avions proposé « Des rencontres inattendues ». On est donc bien en phase avec cette promesse que vous évoquez. Le lieu bénéficie il est vrai d’une localisation favorable : au pied du Lumen, à mi chemin de plusieurs établissements d’enseignement supérieur et de recherche : l’ENS Paris-Saclay, CentraleSupélec, le Pôle Biologie – Pharmacie – Chimie, à proximité aussi d’entreprises innovantes, de centres de R&D, etc. Les personnes qui y travaillent ou qui y étudient ont la possibilité de se croiser au Plato et on en est bien contents !

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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