Le samedi 15 juin 2019, EDF Lab Paris-Saclay ouvrait grand ses portes pour la 2e fois. L’occasion pour le grand public de découvrir l’étendue des domaines de recherche et d’innovation qui y sont explorés. En voici un premier écho à travers cet entretien avec Bernard Salha, directeur de la R&D du Groupe EDF, qui comptait parmi les visiteurs.
– Si vous deviez pour commencer rappeler l’enjeu de cette journée portes ouvertes ?
Elle s’inscrit dans le cadre des journées de l’Industrie électrique EDF. Elle est l’occasion pour nous de rappeler la vocation industrielle du groupe et de montrer comment au travers de la diversité des thématiques liées à l’électricité (la production, les services, le véhicule autonome, l’efficacité énergétique, les smart grids…), elle s’inscrit pleinement dans la transition énergétique. L’enjeu est aussi de faire de la pédagogie, d’expliquer à nos concitoyens, mais aussi à nos agents et à leur famille, les enjeux de cette transition, sachant que les défis ne sont pas simples à relever. Ils requièrent la mobilisation d’expertises de haut niveau et des technologies particulièrement sophistiquées. Mais cette journée est là pour montrer que la R&D d’EDF est entièrement mobilisée. A cet égard, le directeur R&D que je suis ne peut que se réjouir de voir la mobilisation de nos salariés, qui ont pris leur samedi pour accueillir les visiteurs et leur faire découvrir les solutions qu’ils développent pour améliorer notre quotidien à tous.
– « Pédagogie » avez-vous dit. Pour autant, nous ne sommes pas dans une vulgarisation ordinaire : les conférences comme les présentations faites au cours de visites, ne sacrifient en rien à l’exigence de la rigueur scientifique – il y est question de nombreuses équations et de modèles théoriques…
Le fait est. Si les questions touchant à la transition énergétique sont l’objet de débats permanents parmi les citoyens, la R&D à laquelle elles donnent lieu exige des analyses poussées, l’élaboration de modèles sophistiqués, qu’il peut être utile d’avoir en tête pour bien appréhender les enjeux dont on débat.
– Ce niveau d’exigence ne tient-il pas aussi au fait qu’EDF Lab est dans un écosystème dont les habitants sont pour beaucoup d’entre eux acculturés à la science ou à l’innovation technologique pour être eux-mêmes chercheurs, enseignants, ingénieurs, entrepreneurs innovants…
Il est clair qu’ici la population manifeste une appétence pour la recherche et la science probablement plus élevée qu’ailleurs. Cela étant dit, notre volonté est de nous adresser à tous nos concitoyens, en étant aussi pédagogiques que possible. Il nous importe que chacun puisse prendre conscience des enjeux de la transition énergétique, de leur complexité, des limites qu’on rencontre mais aussi des leviers dont on dispose.
– EnR et nucléaire, voiture électrique, smart grids, batteries, intelligence artificielle, blockchain… On ne peut qu’être surpris par le spectre des domaines que vous investissez…
En effet et comment pourrait-il en être autrement ? L’électricité, notre cœur de métier, est partout. Nous nous devons d’explorer toutes les problématiques en mettant à profit nos capacités en matière de R&D et d’ingénierie. La transition énergétique appelle tout sauf à une solution unique et c’est aussi ce qu’une journée comme celle-ci est l’occasion de rappeler. On ne saurait opter pour une énergie au détriment d’une autre. C’est bien en termes de mix énergétique qu’il faut raisonner. Il nous faut aussi améliorer les systèmes existants, par une meilleure efficacité énergétiques, une plus grande flexibilité de nos réseaux (enjeu des smart grids), mais aussi promouvoir de nouveaux usages (le VE, les pompes à chaleur,…). Naturellement, nous ne pouvons non plus passer à côté de la transition énergétique qui impacte directement nos métiers, y compris ceux de la R&D. De là nos recherches autour du big data, de l’IA et de la blockchain.
– Un mot sur le slogan de la journée, arborée sur les t-shirts de vos salariés, à savoir : « Le futur commence ici… ». Quel temps devrait s’écouler entre le moment où il voit le jour ici et celui où il entre dans notre quotidien ?
En fait, le futur est déjà là ! Aujourd’hui, il est possible de recharger son véhicule électrique depuis chez soi, de disposer de quoi optimiser la gestion électrique de sa maison ou de son appartement, de produire sa propre électricité en installant des panneaux photovoltaïque sur son toit… Si vous voulez bénéficier des meilleurs tarifs possibles et d’une électricité 100% décarbonée, c’est encore possible. L’ambition de la R&D du Groupe EDF n’est certainement pas de faire de la recherche pour le plaisir d’en faire, mais de contribuer à la diffusion de ces innovations et ce, le plus rapidement possible pour en faire profiter nos clients et accélérer la transition énergétique.
– Comment caractériseriez-vous la recherche menée ici ?
Sur les quelques 2 000 chercheurs que compte la R&D du Groupe EDF, de l’ordre de 250 enseignent dans de grandes écoles d’ingénieurs ou à l’université. C’est dire, encore une fois, le haut niveau de la recherche menée ici comme sur nos autres sites de R&D. Pour autant, nous ne nous cantonnons pas à de la recherche amont. Si certains de nos projets sont menés à long terme, beaucoup le sont à court terme ; ils touchent à des enjeux d’ingénierie et peuvent avoir des applications immédiates. C’est le cas, par exemple, de nos recherches sur les bornes de recharge, qui portent aussi bien sur leur optimisation que sur des aspects plus pratiques, en vue d’en rendre l’installation la plus commode possible à nos clients. Juste devant nous, un stand rend compte de nos recherches sur les éoliennes off shore : elles portent sur les problématiques liées à leur fondation sous-marine. Des problématiques concrètes s’il en est.
En résumé, si je me réfère à l’échelle dite TRL, qui mesure le niveau de maturité d’une technologie, selon une échelle qui compte jusqu’à 9 niveaux, nous nous situons entre les niveaux 3-4 et les niveaux 7-8. Exceptionnellement, nous pouvons nous situer à des TRL plus bas ou plus élevés. Nous ne prétendons donc pas faire de la recherche fondamentale, mais davantage une recherche industrielle. Nous ne prétendons pas non plus agir seuls.
C’est d’ailleurs tout le sens de notre présence ici à Paris-Saclay qui nous permet de nous associer à une multiplicité de partenaires : des industriels et des start-up, et des acteurs académiques, de façon à bénéficier de leurs compétences et de leur faire profiter des nôtres, au travers de laboratoires communs ou de dispositifs collaboratifs comme l’ITE IPVF. L’enjeu de cette journée est aussi l’occasion de donner à voir toute la richesse de ce réseau de partenaires constitués au fil du temps.
A lire aussi l’entretien avec Béatrice Bianchini-Burlot, Déléguée des sites EDF R&D et Déléguée Sécurité Environnement (pour y accéder, cliquer ici).
Journaliste
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