Il y a un peu plus d’un an, nous rendions visite au bâtiment 503 qui, sur le campus d’Orsay, accueille les élèves de la Filière Innovation – Entrepreneurs (FIE) de l’Institut Optique Graduate School (IOGS). Comment ce lieu emblématique des créateurs de start-up avait-il évolué ? Où en étaient des entrepreneurs rencontrés à cette occasion ? C’est ce que nous avons voulu savoir en nous rendant de nouveau avec à la clé une interview du directeur de l’IOGS et la découverte d’autres start-up prometteuses.
Dans l’entretien qu’il nous avait accordé voici plus d’un an, François Balembois, le directeur de l’Entrepreneuriat et de l’Innovation à l’Institut d’Optique Graduate School (IOGS), avait reconnu l’importance de l’effet « cafétéria » dans la circulation informelle des idées. A cette époque, le bâtiment 503 qui accueille les élèves de la Filière Innovation – Entrepreneurs (FIE) de l’IOGS, mais aussi des entreprises innovantes, en était dépourvu.
Une cantine pour l’effet cafétéria
Quelques mois plus tard, le vœu a été exaucé : le 503 dispose désormais d’un espace cantine. « Pas moins d’une quarantaine d’étudiants et d’entrepreneurs y ont pris leur habitude et le nombre va en progressant » précise Frédéric Capmas, responsable de la FIE.
Quoique sobre, le lieu est accueillant. « Quand il fait beau, il est possible d’ouvrir toutes grandes les portes et de manger sur la pelouse » précise Christine Bruneau, responsable administrative du 503. Manifestement, on en est fier. C’est d’ailleurs le premier lieu que l’on fait visiter, après nous avoir accueilli dans le hall où sont affichés les logos des quelque 22 entreprises actuellement présentes dans les locaux. Autre signe d’évolution significative : une jeune femme assure l’accueil à l’entrée. « Un emploi d’avenir » précise encore Christine Bruneau.
Des couloirs ont pris aussi des couleurs : « Comme la cuisine, c’est les occupants et usagers du bâtiment – étudiants, entrepreneurs et personnels – qui les ont repeints » rappelle Christine Bruneau, pour souligner l’esprit collectif qui règne ici. Un rendez-vous a été d’ailleurs fixé le 19 juillet dernier pour entreprendre collectivement le rafraîchissement d’autres murs. Dans le même souci d’égayer l’ancien bâtiment, mais aussi de mieux communiquer sur ce qui s’y fait, un couloir du premier étage arbore des posters présentant les entreprises et leurs projets.
Puis direction vers le Photonic FabLab, toujours animé par Camille Resseguier, rencontrée lors de notre première visite. Ce matin, des étudiants vont et viennent, de même que des stagiaires et des enseignants d’autres établissements. Car ce lieu dédié au « prototypage exprès » se veut à l’image du 503 : ouvert et propice aux échanges avec l’extérieur. Dans un recoin, l’imprimante 3D… « Un succès, assure Frédéric Capmas. Jusqu’ici, les étudiants allaient jusqu’à la réalisation des plans de conception. Désormais, ils ont intégré la possibilité de prototyper leurs idées. »
Sur un mur, des affiches décrivant divers projets ayant abouti ou pas. Parmi elles, la reproduction d’un vieux bâtiment avec un panneau annonçant un « Institut Optico » Un photomontage ? « Non, assure Frédéric Capmas, il existe vraiment. » En Amérique du Sud précisément, où un ancien résident du 503 l’a découvert de manière fortuite à l’occasion d’un voyage. Le directeur de l’IOGS, Jean-Louis Martin, également présent, approuve : « Cela dit bien ce que veut être le 503 : tout sauf un lieu aseptisé ».
Rencontres avec des entrepreneurs en herbe ou expérimentés
Puis visite des bureaux de différents entrepreneurs. Le premier de la liste : Dominique Gallou, qui a fondé IVEA, une société spécialisée dans l’analyse des matériaux. Surprise : il a des cheveux blancs. C’est que le bâtiment 5003 accueille aussi des entrepreneurs expérimentés. De fait, Dominique Gallou a plusieurs années d’expérience professionnelle au sein de grands groupes industriels. En échange de la mise à disposition de locaux, sa société accueille des étudiants de la FIE. Une logique gagnant-gagnant.
Au rez-de-chaussée, d’anciens ateliers de mécanique ont été progressivement réhabilités. L’un d’eux vient d’être investi par ce que Jean-Louis Martin n’hésite pas à qualifier de « génie de l’innovation ». Un certain Jocelyn Pillet, qui a mis au point un système gyro-stabilisé qui permet de maintenir en équilibre des objets déplacés dans l’espace. Parmi les applications : la possibilité de filmer en défiant les lois de la gravitation et du mouvement. Sa technologie correspond à un marché de niche investi dans le monde par une poignée d’entreprises dont la sienne. Le modèle qu’il est en train de construire est destiné au marché américain.
Comment s’est-il retrouvé ici ? De manière on ne peut plus fortuite, en rencontrant par hasard, un dimanche, l’équipe de Stereolabs, autour… d’un café. Nouvelle illustration de l’ouverture du lieu. « Le 503 a tout à gagner d’accueillir des innovateurs extérieurs » insiste Jean-Louis Martin, car « lls servent d’exemples à nos propres élèves. » Jocelyn profite de la visite pour lui faire part de son souhait d’installer des câbles à l’extérieur pour ses démonstrations. Cette fois, Jean-Louis Martin reprend la ton de directeur de l’IOGS pour s’assurer du respect des conditions de sécurité !
Retrouvailles avec Stereolabs
Parmi les autres entrepreneurs rencontrés : Cécile Schmollgruber que nous avions interviewée (cliquer ici pour accéder à l’article). Avec deux autres étudiants, elle a, en 2008, créé Stereolabs, une société citée plus haut et spécialisée dans la production vidéo 3D. A l’époque, elle revenait d’un séjour à Los Angeles, où elle avait notamment rencontré l’équipe de James Cameron.
Que de chemin parcouru depuis ! Au sens propre comme au figuré : Stereolabs a quitté les bureaux du premier étage pour investir un espace plus spacieux (250 m2 !) où, ce jour- là, une demi douzaine de salariés et de stagiaires s’affairent devant leur écran d’ordinateur. Dans un coin, à l’entrée, une pièce en forme de décor pour tester la caméra plantée au milieu de l’openspace. Dans une salle de réunion, les trophées et récompenses accumulées par Stereolabs depuis sa création. L’ensemble est soigneusement aménagé. C’est que cette société reçoit des clients américains… « Lesquels apprécient beaucoup l’ambiance “ garage ” qui continue à dominer ici » observe Cécile Schmollgruber.
Cette fois, celle-ci revient de Shanghai. « En Chine, les salles de cinéma 3D se multiplient et ce, avec le soutien du gouvernement qui a fixé des objectifs ambitieux dans le cadre du plan pluriannuel actuel. » Cécile n’en continue pas moins à se rendre aux Etats-Unis, en Californie précisément. Stereolabs vient de décrocher un contrat pour participer à la réalisation du prochain Avatar de James Cameron…
Pour l’heure, elle n’aspire pas à quitter le lieu. Et de son côté, Jean-Louis Martin n’a guère l’intention de la mettre à la porte ! « Stereolabs est un exemple pour nos entrepreneurs en herbe. » Lesquels n’hésitent pas à lui rendre visite pour recueillir des conseils. A l’image de Jean Inard-Charvin et Geoffrey Bruno, tout jeunes fondateurs d’Enovasense, qui viennent d’être lauréats du concours national OSEO d’aide à la création d’entreprise innovante, en catégorie « Emergence ». Ironie de l’histoire : leur start-up – autre étape de la visite – occupe les anciens bureaux de Stereolabs (cliquer ici pour accéder à leur portrait).
Parmi les autres étapes : une salle de réunion investie ce jour-là par des membres de l’association de robotique OMyBot. Ils sont en train de procéder à de nouveaux réglages de leur création, en vue de la prochaine édition de la coupe de France de robotique et d’Eurobot. Pour mémoire, ce concours met en compétition des équipes européennes à travers les robots qu’elles ont mises au point. La gagnante est celle dont le robot à amasser le plus de points au travers de différentes épreuves. Arrivée 9e lors de la dernière édition, OMyBot en est repartie avec le prix du jury pour des partis prix audacieux. En l’occurrence pour un système de positionnement spatial optique permettant des lancées de balles…
Quand innovation rime avec ludique… Malgré un emploi du temps chargé, Jean-Louis Martin aura finalement assisté à l’intégralité de la visite. Manifestement, il prend plaisir à se plonger dans l’atmosphère du lieu. « Atmosphère » : le mot revient tel un leitmotiv dans sa bouche et l’entretien qu’il nous a accordé. On ne saurait mieux dire : le 503 ressemble à nul autre lieu dédié à l’innovation et l’entrepreneuriat.
Suite de la visite du 503 à travers un entretien avec Jean-Louis Martin.
Journaliste
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