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« La pause qui change tout »

Le 11 juin 2025

Rencontre avec Élise Tourniaire

- Vous faites partie de l’équipe du Plato, le lieu de restauration installé par la Table de Cana, au pied du Lumen. Comment vous y êtes-vous retrouvée ?

Élise Tourniaire : J’ai connu la Table de Cana par le bouche à oreille et y suis arrivée par recommandation. Le poste que l’on m’y a proposé correspondait à ce que je voulais, à savoir : un travail qui mêle à fois une dimension sociale et de la communication. Ce que j’apprécie aussi dans cette entreprise, c’est qu’il ne s’agit pas de faire que du « chiffre » : la Table de Cana est une entreprise à but non lucratif ayant vocation à accompagner des personnes en insertion. Une dimension humaine qui tend à se perdre dans le monde de la restauration et en vérité dans bien d’autres secteurs, où on ne laisse plus de place au temps d’échange avec les clients. Voilà comment et pourquoi je suis arrivée ici.

- Que voulez-vous dire par « dimension sociale » : accompagnez-vous des personnes en insertion ? Pourtant, à la Table de Cana, vous êtes d’abord au contact des clients…

É.T. : Mon travail recouvre les deux aspects ! Je manage aux côtés de ma responsable une équipe de personnes en insertion, en contrat de formation de quatre mois, renouvelable pendant deux ans. L’emploi qu’elles occupent est censé être un tremplin vers un retour sur le marché de l’emploi classique – elles sont formées pour cela à un ou plusieurs métiers de la restauration. Vis-à-vis des clients, l’approche est bien sûr tout autre. Pour ma part, j’aime prendre le temps de discuter avec eux, en essayant de leur faire vivre un moment agréable. Je ne conçois pas de ne faire que le servir, d’encaisser en me contentant d’un « bonjour » et « au revoir ». Comme j’aime à dire, je souhaite que leur passage au Plato soit un moment agréable. Je mets donc en application notre mantra : « Le Plato, la pause qui change tout ! »

- Je confirme ! [Rire]. Un mot sur l’environnement dans lequel se situe Le Plato, à savoir le quartier de Moulon. Le connaissiez-vous avant de venir ?

É.T. : Oui, mais sans avoir pris jusqu’ici la mesure de son potentiel. Un potentiel immense : ici, des personnes – des startuppeurs, étudiants, chercheurs, enseignants… – viennent du monde entier. De nombreux projets et initiatives y voient le jour. On sent ici une effervescence et c’est ce que j’aime aussi. Reste à créer du lien entre ces différentes personnes et justement, Le Plato, peut être un lieu propice à cela. Je commence à réfléchir à ce que nous pourrions mettre en place, en tirant profit du bel espace dont nous disposons.

- On comprend mieux votre aspiration à prendre le temps d’échanger avec vos clients : ce serait dommage de se priver de cette richesse humaine ! Venons-en à votre propre cursus qui vous a amenée à suivre une formation en… Marketing digital !

É.T. : Un domaine à des années-lumière de celui que j’ai investi à travers la Table de Cana. Quoique…

- Quoique, en effet, car vous aspirez justement à mettre ce marketing social au service du social. Avant de préciser comment, pouvez-vous rappeler ce qui vous a orientée vers ce domaine ?

É.T. : En réalité, ce à quoi j’aspirais, c’était de faire du journalisme…

- Un très beau métier !

É.T. : En effet. Seulement, à l’époque, on m’a mise en garde contre le fait que la filière était « bouchée ». Sans me dissuadée d’en faire un jour, on m’a conseillé de faire des études en communication. J’ai donc fait une école spécialisée, Sup de Pub. Mais au fil des études, ma fibre sociale n’a fait que se confirmer et j’ai eu de plus en plus envie d’utiliser les outils de communication et de marketing au service de causes, d’associations, d’établissements qui travaillent dans le social, comme l’insertion par l’activité économique.

- De fait, des ONG se sont mises à l’heure de la communication, du marketing digital. Reste que de manière générale, on n’associe guère spontanément ce dernier aux acteurs de l’économie sociale et solidaire, sauf à ce qu’ils soient davantage dans une démarche d’entrepreneuriat social, et encore… Vous êtes-vous d’ailleurs heurtée à cet apparent fossé entre l’univers du marketing digital et cette économie sociale et solidaire ?

É.T. : En effet, force est de constater que les associations sont souvent hermétiques aux techniques du marketing digital. Imaginez la scène : moi, étudiante fraichement diplômée de Sup de Pub, ayant de convaincre de l’intérêt pour ces associations d’appliquer des techniques en usage dans des entreprises du secteur privé, tournées vers la profitabilité. Donc, oui, j’ai été confrontée à des malentendus sinon du scepticisme [rire]. Ce que je déplore bien sûr. Toujours est-il que cela m’a confortée dans l’idée de me tourner vers le social, dans ce qu’il peut avoir de classique : après une expérience au sein d’une collectivité territoriale, j’ai quitté la communication pour devenir éducatrice dans la protection de l’enfance. Une expérience qui n’a duré qu’un an. C’est ainsi que je me suis retrouvée à la Table de Cana, où mon poste de responsable adjointe m’offre l’opportunité de concilier les deux, d’imaginer des événements que nous pourrions organiser au Plato tout en manageant des personnes en insertion.

- Pouvez-vous en dire un peu plus sur les projets que vous avez en tête, la manière dont vous envisagez de tirer profit des potentialités du lieu ?

É.T. : Nous pourrions, par exemple, accueillir toutes sortes de rendez-vous autour du livre, de la musique, et communiquer dessus. Quant à savoir comment intégrer le marketing digital, il est encore trop tôt pour le dire.

- Heureusement, de nombreux exemples existent qui démontrent la capacité de concilier le digital avec une approche humaine (cf ces plateformes qui combinent chatbot avec la possibilité d’échanger directement avec une personne, laquelle a accès à votre dossier de sorte qu’on peut entrer dans le vif du sujet)…

É.T. : Dans les réseaux sociaux, j’observe beaucoup de démarches consistant à proposer un traitement médiatique plus positif de l’actualité en faisant découvrir toutes sortes d’initiatives associatives, entrepreneuriales, locales…. Je pense en particulier à des pages Instagram. En scrollant, je vois aussi pas mal de contenu éducatif, qui s’emploie à transmettre des valeurs de solidarité, d’entraide.

- Une manière de répondre à l’éco-anxiété dont on dit qu’elle affecterait de plus en plus de jeunes ?

É.T. : Probablement, et si le digital peut y aider, tant mieux. Qu’on le veuille ou non, le monde se digitalise de plus en plus. Il convient donc de s’adapter en se disant que ce peut être aussi dans notre intérêt, car le digital est un outil utile à de bonnes causes : il permet de communiquer dessus, de lever des fonds nécessaires au financement de belles initiatives, etc. Et puis, pour ma part, j’ai confiance en l’humain et sa capacité à tirer le meilleur des nouvelles technologies.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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