Le 11 avril 2019, se déroulait l’édition 2019 de mobilité@VEDECOM, le rendez-vous de l’ « innovation au service des mobilités durables », sur le site du tout nouveau mobiLAB, inauguré en février dernier. En voici un premier écho à travers le témoignage de Philippe Watteau, directeur général de VEDECOM, qui a bien voulu répondre à nos questions entre deux sollicitations.
– Si vous deviez pitcher le concept de cette journée mobilité@VEDECOM ?
Cette journée revêt une importance particulière pour nous puisqu’elle offre l’occasion de donner à voir la dynamique de développement de VEDECOM. Une dynamique qui est fondée sur la notion de confiance. Cette confiance est en effet indispensable si nous voulons rendre viables les mobilités de demain, tant au plan technique (parce que fiables), social (parce que plus équitables), environnemental (parce que moins polluantes et énergivores), que de leur acceptabilité par la société.
J’ai dit confiance, je devrais dire « TRUST », non pas par abus d’anglicisme, mais parce que c’est un acronyme qui permet de décliner les différentes dimensions par lesquelles nous voulons instaurer cette confiance : T comme Technologie (parce qu’évidemment, les nouvelles mobilités reposent sur des innovations technologiques), R comme Règles (les technologies ne sauraient suffire, il faut aussi définir de nouvelles règles pour encadrer les mobilités de demain), U comme Usage (on sait que c’est en étant capable de répondre à des usages qu’on peut en assurer l’appropriation par les usagers), S comme Systèmes ou Services (les nouvelles mobilités ne se limitent pas à des véhicules, c’est aussi de nouvelles infrastructures et fonctionnalités à imaginer), enfin, T comme Territoire (rien ne se fait sans l’approbation des citoyens, telle qu’elle s’exprime dans leur cadre de vie et de travail et, donc, sur les territoires). Si, par conséquent, il y a un message que les équipes de VEDECOM ont à cœur de faire passer au cours d’une journée comme celle-ci, c’est la nécessaire confiance à établir, pour parvenir à des mobilités réellement durables. Cette édition avait cependant une valeur symbolique supplémentaire puisqu’elle correspondait au 5e anniversaire de la création de notre institut.
– « Confiance », dites-vous. Y incluez-vous aussi celle à établir entre les académiques et les industriels comme ceux que vous intégrez au sein de vos différents projets ? Au sortir des diverses visites que j’ai pu faire, j’ai eu le sentiment qu’ils étaient parvenus à une réelle symbiose – ce qui n’était pas a priori acquis compte tenu de la défiance qui a pu exister entre le monde universitaire et celui de l’industrie. Etait-ce quelque chose d’acquis dans le cas de VEDECOM ou quelque chose qu’il a dû construire au fil de ses cinq années d’existence ?
On aborde là un des miracles de VEDECOM ! Celui d’être parvenu justement à faire travailler des académiques et des industriels, mais aussi des startuppers, autour de cette ambition commune des mobilités durables. Une ambition dans laquelle se sont retrouvés aussi bien des chercheurs et des ingénieurs, que des jeunes et de moins jeunes, des représentants des sciences de l’ingénieur et ceux des sciences humaines et sociales, ceux qui abordent les mobilités par les techniques et ceux qui les abordent au prisme des facteurs humains, par les véhicules ou par les infrastructures. Au final, VEDECOM s’est imposé naturellement comme le point de convergence entre l’ensemble des activités, des filières et des métiers impliqués dans les mobilités durables.
– En mettant à disposition toutes sortes de moyens : des compétences et expertises humaines, des équipements et jusqu’à des pistes d’essais, qui se révèlent particulièrement utiles pour les recherches sur le véhicule autonome. N’est-ce pas une autre clé de réussite de VEDECOM ?
Si, bien sûr. C’est pourquoi il était grand temps que nous investissions ce nouveau bâtiment où nous sommes, le mobiLAB, un lieu qui permet de poursuivre les études les plus amont, les plus scientifiques, jusqu’au stade du prototypage, et à proximité de ces pistes d’essai, qui offrent la possibilité de tester en temps réel les technos issues de nos études. J’ajoute que le mobiLAB, c’est aussi un Mobility Spot, qui se décline en un espace de créativité (Le HUB), un FabLab (Le FAB), et des ateliers & garages (Les Ateliers). De quoi permettre de faire de l’idéation, du maquettage et du prototypage.
– Si vous deviez caractériser davantage ce bâtiment du mobiLAB, qui a été manifestement conçu pour favoriser les interactions entre les différentes équipes…
C’est un bâtiment dont je commencerai par dire qu’il est beau ! Quoi de plus naturel me direz-vous. Nous sommes à Versailles Satory. Il se devait donc de l’être plus qu’ailleurs. Tout en étant fonctionnel, il offre l’avantage de prendre la lumière de l’environnement, ce qui ajoute au confort des équipes, qui disposent par ailleurs, en plus de leurs espaces en propre, d’espaces partagés, qui facilitent les interactions que vous évoquiez, tout en respectant le confort de chacun. Tandis que le rez-de-chaussée et le 1er étage sont dédiés aux études, le rez-de-jardin l’est aux halls techniques, la circulation se faisant très simplement d’un niveau à l’autre. Ce bâtiment se devait d’être d’autant plus beau, fonctionnel, agréable et accueillant, en un mot attractif, que l’un des enjeux de VEDECOM est de parvenir à attirer les jeunes talents, aussi bien en France qu’à l’international.
– Y réussit-il ?
Oui. La moitié des effectifs actuels ont moins de trente ans et représentent plus d’une vingtaine de nationalités. Mais la compétition est internationale, il nous faut donc consentir un effort constant.
– Combien d’effectifs abrite-t-il ?
Près de 200 personnes, auxquelles s’ajoutent les équipes de Transdev et de l’IFSSTAR. Ce qui peut paraître beaucoup et qui l’est effectivement. Malgré cela, VEDECOM reste à taille humaine. Rappelons aussi que nous nous sommes dans un quartier, celui de Satory, en pleine expansion, ce qui est forcément inspirant.
– Qu’en est-il des interactions du mobiLAB avec le reste de l’écosystème de Paris-Saclay ?
VEDECOM fait pleinement partie de cet écosystème et nous considérons bien évidemment que c’est une chance ! Nous avons vocation à développer des coopérations avec plusieurs de ses acteurs. Il faut garder en tête que VEDECOM est une fondation partenariale de l’Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, qui fait elle-même partie de l’Université Paris-Saclay. Nous comptons être encore plus en interaction avec les grands organismes de recherche que compte l’écosystème – Inria, le CEA,… – et ses différentes grandes écoles tournées vers les enjeux de la transition énergétique. Pour ces écoles, nous représentons en sens inverse une opportunité en termes d’offres de stages, de projets de thèse et d’emplois pour leurs élèves.
– Encore un mot sur les projets menés ici. Pour m’être rendu à la précédente édition de mobilité@VEDECOM, j’ai pu constater la rapidité avec laquelle plusieurs de ces projets ont avancé et même débouché sur de nouvelles perspectives de développement technologique (je pense notamment au projet sur la piste par induction, qui en est déjà à réfléchir à des plaques électromagnétiques de nouvelle génération). A quoi cela tient-il ?
VEDECOM a été créé en 2014 avec d’emblée la volonté d’accélérer le passage de l’idéation à la concrétisation. Dès 2015, VEDECOM s’était déjà montré en capacité de mettre sur route ouverte un véhicule autonome de niveau 4. Une première en France. Bref, VEDECOM a toujours été réactif et rapide. C’est un impératif compte tenu de la compétition internationale qui se joue autour des mobilités durables. Une autre des raisons qu’on peut avancer pour expliquer cette rapidité, c’est la capacité de VEDECOM d’instruire simultanément, en parallèle et de manière transversale, les différentes dimensions du véhicule autonome : en même temps qu’on traite des aspects techniques, on traite des aspects juridiques, des usages, de l’acceptabilité sociale, etc.
– Dans quelle mesure les ITE en général et VEDECOM en particulier concourent-ils à combler le retard que la France semblait avoir en matière de recherche technologique, à l’articulation de la recherche académique et des applications industrielles ? Dit autrement, quelle analogie peut-on faire avec les Fraunhofer allemands, ces instituts spécialisés dans la recherche en sciences appliquées ?
Les Allemands sont souvent montrés en exemple sinon en modèle en matière de recherche appliqée. Faut-il pour autant ne se référer qu’à eux ? La France n’a-t-elle pas une voie propre à poursuivre ? La question mérite d’être posée. Toujours est-il que VEDECOM est comme les huit autres ITE et les IRT, un enfant du « grand emprunt » [les investissements d’avenir]. En moins de quatre-cinq années d’existence, ces instituts ont atteint un niveau de maturité. La prochaine étape, c’est une plus grande coordination des uns avec les autres pour constituer ensemble un Fraunhofer à la française, en y incluant les organismes de recherche avec lesquels ils coopèrent déjà. Un rapprochement est d’ailleurs en cours entre les IRT et les ITE, sous l’impulsion de l’Etat. Ce rapprochement ne signifie pas la fin de leur autonomie. Celle-ci est essentielle à leur bon fonctionnement. Elle est d’ailleurs une autre caractéristique des Fraunhofer allemands.
A lire aussi les entretiens avec :
– Sid Ali Randi, ingénieur de Renault, détaché à l’ITE VEDECOM, où ii conçoit avec son équipe des machines électriques innovantes pour les besoins de ses partenaires (pour y accéder, cliquer ici) ;
– Véronique Berthault et Frédéric Chaurang, en charge respectivement, au sein de la direction de la stratégie, de l’innovation et du développement du groupe RATP, du programme du VA et de sa coordination technique (cliquer ici).
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