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Entrepreneuriat innovant

La 5G, c’est pour (presque) demain.

Le 17 décembre 2018

Les 14 et 15 novembre 2018, se déroulait la 5e édition du Nokia 5G Smart Campus Event. L’occasion de faire le point sur les avancées et les promesses de cette nouvelle génération de réseaux de téléphonie mobile, à travers des conférences et des démos. En voici des échos, qui confirment que c’est bien à la Cité de l’Innovation de Nokia Paris-Saclay que cela se passe…

Avec la 5G, nouvelle génération de réseaux de téléphonie mobile, nous sommes à la « veille » d’une révolution, mais il faudra encore patienter avant qu’elle impacte notre quotidien et le monde industriel, en France comme ailleurs dans le monde. La faute au retard pris dans l’attribution des fréquences. Et même les pays qui se targuent d’être déjà entrés dans l’ère de la 5G ou sur le point de le faire, abusent en réalité d’effets d’annonce. Tel était la teneur du principal message qu’on avait retenu de la précédente édition du Nokia 5G Smart Campus Event, même si les démos avaient déjà de quoi enthousiasmer les plus sceptiques.
Icono Smart5G 201815 novembre 2018DSCF8221Un an plus tard, le décors est le même, la Cité de l’Innovation de Nokia Paris-Saclay, mais le discours a changé du tout au tout. C’est que les choses se sont accélérées au point que la 5G pourrait s’inviter plus vite qu’on le pensait dans nos existences et les entreprises, avec son lot d’applications nouvelles, malgré encore beaucoup d’incertitude sur tout le potentiel qu’on pourra en tirer.
Tel était la teneur du message à retenir de cette 5e édition. Rajeev Suri, le CEO de Nokia avait donné le ton, via une vidéo diffusée en ouverture de l’événement non sans arguments, même si on pouvait se demander, dès lors que c’est une révolution qui s’annonce, pourquoi il n’avait pas jugé utile de faire le déplacement…

La 5G, je sais ce que c’est… tant que personne ne me le demande

Mais au fait, la 5G, cela consiste en quoi au juste ? Elle a beau être annoncée depuis plusieurs années, des événements ont beau bruisser de ses promesses apparemment illimitées, le fait est qu’on peine encore à en expliquer les principes. Tout se passe encore un peu comme pour saint Augustin à propos du temps : qu’est-ce donc que la 5G ? Si personne ne me le demande, le sais ; si je cherche à l’expliquer à celui qui m’interroge, je ne le sais plus.
C’est que si les caractéristiques ont été définies a priori, on n’en prend pas toute la mesure. Surtout ses applications sont encore pour la plupart à inventer quand elles ne dépassent tout simplement pas l’imagination. Et c’est tout le mérite d’Alain Biston, Manager Général de Nokia Mobile Events, de nous avoir aidés à y voir plus clair dans une conférence magistrale (dans les deux sens du mot).
De prime abord, qui dit 5G, pense beaucoup plus de débit (plusieurs Gb/s), grâce au recours à des ondes millimétriques ayant l’avantage de proposer une large bande passante. Ce n’est pas faux, mais si ce n’était que cela, la 5G, ce ne serait qu’une 4G améliorée…
En réalité, elle est bien plus que cela (de sorte que d’aucuns considèrent que l’appellation de 5G est trompeuse). En l’occurrence, c’est une latence particulièrement faible, nettement inférieure au temps de réaction humaine (puisqu’en deça de la milliseconde). Ça n’a l’air de rien, mais ça change tout et ouvre de nouvelles perspectives à de très nombreux domaines connus – les véhicules autonomes (qui ont besoin de réagir autrement plus vite qu’un conducteur pour limiter les risques de collusion), la chirurgie à distance, les processus de fabrication industriel, les jeux vidéos et de manière plus générale l’Internet des Objets – et encore inconnus…
Dissipons un malentendu : le temps de latence entre émetteur et récepteur restera encore tributaire de la qualité du réseau. Le réduire suppose donc que les données soient exploitées au plus près des lieux d’usage et donc de privilégier des data centers de proximité, c’est-à-dire situés à moins de 100 km. C’est dire si la 5G rimera aussi avec décentralisation.
Reste maintenant à convaincre industriels et opérateurs à entrer dans la danse. Ce serait désormais le cas à entendre Alain Biston. Pour preuve : l’inflation des stations radio à installer. Nokia en avait prévu quelques centaines d’ici la fin de l’année. Finalement, ce sera de l’ordre de 10 000, rien qu’en Europe et ce, malgré l’absence d’uniformisation des spectres et la variété des fréquences.

Entre 4G++ et 5G–

Et encore l’Europe n’est pas forcément la plus en avance. Pour l’heure, c’est encore la Corée du Sud et le Japon qui sont en tête de peloton, au regard des échéances de déploiement (l’ouverture commerciale a lieu au cours de ce mois, en Corée ; elle est programmée pour 2019 au Japon, en vue des JO d’été 2020). L’Australie et la Nouvelle-Zélande seraient aussi en avance : les deux pays annoncent une allocation des fréquences en décembre de cette année pour une ouverture commerciale en 2019. Les Etats-Unis combleraient leur retard tandis que la Chine avancerait lentement mais sûrement (après une phase de tests orchestrée par l’Etat, elle est en passe de passer à la phase opérationnelle au travers de ses opérateurs de téléphonie). Gare cependant aux effets d’annonce : sous couvert de 5G, c’est en réalité de la 4G++ ou 5G– qui se profile (c’est que toutes les caractéristiques du standard ne seront pas proposées au même moment).
Quant aux applications, Alain Biston en donne un premier aperçu en distinguant celles consistant à améliorer des applications existantes et celles à inventer de toutes pièces, non sans obliger du même coup à plus de convergence entre opérateurs, industriels et start-up pour imaginer ensemble les use cases (cas d’utilisation) les plus pertinents, car il est peu probable qu’un seul acteur y parvienne à lui tout seul. Mais comment anticiper ces use cases ? C’est là qu’intervient un autre concept : l’open system network (au Nokia 5G Smart Campus Event, les anglicismes sont décidément prisés), censé permettre aux parties prenantes de l’innovation d’œuvrer ensemble pour définir ces use cases et les traduire en nouvelles applications ou équipements.

Une vingtaine de démos

Pour achever de se convaincre qu’une révolution 5G est bien en cours et en prendre la mesure, le visiteur avait tout loisir d’arpenter la Cité de l’Innovation et plusieurs de ses bâtiments, pour y assister à d’autres conférences et découvrir pas moins d’une vingtaine de démos, réparties en diverses thématiques : le network slicing (ou tranches de réseau), l’IA, les applications pour le quotidien, la ville digitale ou encore l’entreprise digitale. Même si certaines démos reposaient encore sur des réseaux 4G+ (LTE), la plupart exploitaient bien les ressources de la 5G.
Icono Smart5G 201815 novembre 2018DSCF8221Dédiée à cette dernière, la Cité de l’Innovation (3 800 personnes dont près de la moitié, 1 700 s’y consacrent activement), dispose d’un avantage de poids : elle vit déjà à l’heure de la 5G grâce à iFUN (pour internal Friendly User Network), un réseau 5G expérimental déployé avec l’accord de l’Acerp (l’Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes). Ce qui concrètement permet à ses chercheurs et ingénieurs de tester des solutions (non sans bénéficier du feed-back immédiat de clients potentiels au travers de leurs propres collègues), mais aussi d’accueillir des partenaires (industriels, start-up,…) ayant besoin d’explorer ou de tester des applications nouvelles de la 5G.

Roland Garros comme si vous y étiez

Une première illustration en est fournie avec la retransmission d’images (en l’occurrence de la finale du tournoi féminin de Roland Garros 2018) sur écran 8K, la future génération d’écran à très haute définition. Une première mondiale proposée par France 2, plus que convaincante : la qualité image est telle qu’on a la sensation d’être au milieu des spectacteurs. Autre intérêt de la 5G pour la télé de demain : la possibilité de démultiplier les chaînes sur un même canal (jusqu’à 36) et de les visionner d’un seul regard sur son écran. Cependant, on comprend aussi que sa diffusion n’est pas encore pour demain : si des industriels annoncent la fabrication d’écrans adaptés, il reste à pouvoir diffuser les images (le réseau de la TNT n’est pas assez robuste).
Au-delà de la TV, c’est la manière de vivre un événement (dans un stade, lors d’un concert,…) qui changera du tout au tout : tout en restant collective, l’expérience sera personnalisée. Et ce, grâce à un nouveau concept, le réseau slicing permettant de plugger des réseaux complémentaires et éphémères, répondant à des besoins spécifiques le temps de l’événement.

Des concerts personnalisés

Sans attendre, une start-up propose déjà une solution permettant d’améliorer le confort d’audition d’un concert : la bien nommée Augmented Acoustics, créée il y a quatre ans, par trois fans de musique, revenus déçus d’un concert du fait de la piètre qualité du son et des nuisances sonores. Elle propose une solution, Supralive, permettant aux malentendants (et en réalité à tout un chacun) de suivre un concert en pouvant concentrer leur écoute sur un instrument ou un groupe d’instruments via un interface composé de curseurs (jusqu’à huit correspondant à autant de pistes). Une solution que la start-up compte bien migrer sur la 5G pour dispenser les utilisateurs à devoir recourir à un boitier comme c’est le cas actuellement.
Dans un tout autre registre, Ethereal Games, autre start-up, a exploré des applications possibles dans le domaine des jeux vidéos en tablant sur l’amélioration de la latence. Nous avons testé Tomatron (le principe : les joueurs doivent au moyen d’une console se renvoyer une balle en faisant coulisser un arc). Le moins qu’on puisse dire, c’est que le passage de la 4G à la 5G change tout quant au niveau de réactivité requis pour l’emporter…

Des nouvelles du Garage…

Augmented Acoustics, Ethereal Games deux exemples parmi d’autres de start-up accueillies au sein du désormais fameux Garage, que Nokia mettait de nouveau à l’honneur en en faisant un des spots de son Nokia 5G Smart Campus Event. L’occasion d’y croiser Bertrand Marquet, son cofondateur, qui en a rappelé la triple vocation d’incubateur, d’accélérateur et de FabLan. Destinés au départ aux salariés du site, désireux de prototyper des idées, il s’est très vite ouvert, non sans avoir plus que gagné en surface, à des porteurs de projets extérieurs, à qui il propose notamment une mise à disposition des briques technologiques « maison ».

… et de Move In Saclay

Nous y avons aussi croisé Eric Lacombe, qui y faisait une présentation de la plateforme Move In Saclay. Sa principale originalité : considérer les données des divers acteurs de l’écosystème Paris-Saclay, publics et privés, comme un bien commun et inciter ces parties prenantes à les mutualiser fut-ce à des degrés variables, de façon à permettre d’imaginer de nouvelles applications en matière de mobilité. Si les fonctionnalités offertes retiennent l’intention, de même que la possibilité d’inciter les usagers à adopter des modes doux de déplacement (par un système de gratification), c’est la capacité à mettre autour de la table une grande diversité de partenaires – collectivités, l’EPA Paris-Saclay, industriels, startuppers,… – qui impressionne. Car c’est aussi la démonstration qu’une plateforme numérique prend tout son sens quand elle s’inscrit dans un projet territorial (sans que cela exclut la possibilité de la transposer dans d’autres contextes moyennant des spécifications).
Le même Eric Lacombe reconnaît que toute élaborée soit-elle, la technologie numérique ne suffit pas. Encore faut-il que la législation soit incitative. Justement, le contexte est favorable : la future loi relative mobilité prévue en 2019 devrait encourager les entreprises à intégrer les mobilités douces dans le forfait de mobilité durable. A suivre donc. En attendant, on aura mesuré le chemin parcouru depuis la démo qui avait été proposée de Move In Saclay, au même endroit, lors de la précédente édition du Nokia 5G.

Icono Smart5G 2018Solar connected bike19 pays, en 90 jours et en vélo hybride

De mobilité, il en fut question en d’autres occasions, sous la forme de projets plus modestes en apparence mais pas moins intéressants. C’est le cas de Solar Connected Bike, un vélo hybride encore à l’étape de prototype et que ses concepteurs se sont fixé pour objectif de lui faire parcourir, avec ses 900 kg, 19 pays et ce, en 90 jours… Une belle illustration, au passage, de la manière dont le numérique peut contribuer à des mobilités durables et à écrire les pages d’une belle aventure humaine. Où on voit aussi que pour s’être mise à l’heure de la 5G, la Cité de l’Innovation ne s’interdit pas de développer des technologies plus « low ».

Quel impact sur la santé ? Sur les métiers ?

Le temps passe décidément vite. Il est déjà l’heure de déjeuner. Nous sommes conviés, avec d’autres journalistes, à échanger de manière informelle avec Alain Biston et Thierry Boisnon, le Président de Nokia France. Les questions s’enchaînent des plus pointues aux plus générales, y compris du genre qui fâche : qu’en est-il des risques de la 5G et de ses ondes magnétiques pour la santé ? Nos interlocuteurs se veulent rassurants au vu, disent-ils, des résultats de recherche et des évaluations disponibles…
A propos d’impact, on ne peut s’empêcher de songer à celui à en attendre sur les métiers. Un enjeu dont Thierry Boisnon dit avoir conscience et ce, d’autant plus que Nokia possède une usine en propre, dont les process ne manqueront pas d’être impactés par l’arrivée de la 5G. Le même tient cependant à regarder aussi le verre à moitié plein : la 5G, c’est a priori la possibilité de reconfigurations plus rapides d’usines et d’autres lieux de production, en fonction des besoins, et donc des gains possibles au plan de l’efficacité énergétique. Il va plus loin en considérant que là où l’internet avait tendance à détruire de la valeur dans le monde industriel, la 5G permettra d’en recréer.

Malheureusement, il nous a fallu quitter la Cité de l’Innovation avant même l’achèvement de l’événement, en mettant à profit une opportunité de covoiturage (merci à Philippe…). Mais nous en avions vu et entendu assez pour y voir plus clair sur la 5G et ses enjeux. D’abord, elle n’est pas appelée, dans l’immédiat, à se subsister à la 4G (laquelle pourra encore rendre de précieux services), ni au Wifi ni à la fibre. Ensuite, et quoi qu’on dise, il va falloir encore attendre pour en tirer pleinement profit. Cela étant dit, on a vu combien d’une édition à l’autre du Nokia 5G Smart Campus Event, le temps pouvait s’accélérer et les événements se précipiter. A se demander d’ailleurs si ce rendez-vous désormais incontournable ne devrait pas être programmé tous les semestres…

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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