Entre l’ONERA et le Plateau de Saclay, des noces de platine.
Le sait-on ? L’ONERA est l’un des centres de recherche les plus anciens du plateau de Saclay. Créé en 1946, il s’y installe en 1952, dans les anciennes fortifications de Palaiseau. La directrice de ce site, Bénédicte Fighiera, a bien voulu nous en ouvrir les portes le temps d’un entretien et d’une visite. Elle témoigne de son évolution, comme de celle de l’écosystème Paris-Saclay qu’elle a pu suivre de près, depuis 2008. Et lève le voile sur les événements programmés dans la perspective de la 70e bougie que cet organisme soufflera en septembre prochain.
– Pour commencer, pourriez-vous nous dire où nous nous trouvons ?
Vous êtes au siège social de l’ONERA, sur la commune de Palaiseau. Un site doublement historique puisqu’il occupe un des anciens forts ayant fait partie de la ceinture de fortifications, construite après la défaite de 1870, entre 1872 et 1874, en vue de défendre Paris contre de nouvelles invasions. En fait, l’ouvrage à vocation défensive ne servit jamais. Il pâtit de la découverte d’une nouvelle poudre, qui permettait de se jouer de l’épaisseur des murs. Ironie de l’histoire : le fort servira de casernement pour les Allemands, pendant la Seconde Guerre mondiale. Il sera ensuite attribué par l’Etat à l’ONERA, qui, créé en 1946, l’occupe de manière effective depuis 1952.
– Ce qui fait donc de l’ONERA un des acteurs les plus anciens de Paris-Saclay…
Oui. Mais peut-être aussi parmi les plus discrets. Et pour cause. L’activité historique concernait la recherche dans les propulseurs. Le site de Palaiseau avait l’avantage de disposer d’espace (il fait 19 ha) et de galeries semi-enterrées, où on pouvait installer sans difficulté des bancs d’essais. Il avait aussi l’avantage d’être suffisamment isolé de la population et, donc, de limiter les nuisances sonores liées aux essais.
– Précisons à l’intention de nos lecteurs que, pour autant, l’ONERA n’est pas reclus dans des fortifications du XIXe siècle…
(Rire), non en effet. A la fin des années 80, il s’est enrichi de nouvelles constructions, les bâtiments situés les plus au sud. A quoi s’est ajouté, au nord, un nouveau bâtiment, livré en 2010, qui a permis de doubler la taille des effectifs : 600 personnes travaillent désormais ici. Nous avons été rejoints par une partie du personnel de Châtillon et des services de la Direction générale. Ingénieurs et chercheurs sont encore largement majoritaires. Ils représentent 70% des effectifs. Précisons encore que nous accueillons de nombreux thésards.
– Depuis, l’activité s’est largement diversifiée…
Oui. L’ONERA a vocation à couvrir la recherche scientifique et technique dans tous les domaines de l’aérospatiale, que ce soit les avions, les hélicoptères ou les fusées, les missiles et les drones. Nous nous intéressons à tout ce qui vole, en privilégiant – c’est l’une de nos particularités – une approche multidisciplinaire : nos recherches portent aussi bien sur les matériaux (pour rendre un avion plus économe ou plus furtif, par exemple), les enjeux de sécurité (au niveau du pilotage), la localisation (nous sommes impliqués dans la conception de radars) et toutes les activités autour de l’optique pour mieux voir ou être vu..
– Comment poursuivez-vous ces recherches ? Engagez-vous des partenariats ?
Oui. L’ONERA est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) mais 60% de notre budgetprovient de contrats (ce qui est exceptionnel dans le cadre de la recherche publique). Quoique nous soyons sous tutelle du ministère de la Défense, notre activité civile est également importante. Nous avons même des partenariats avec des entreprises extérieures au secteur de l’aéronautique, comme SNCF, pour lesquelles, par exemple, nous mettons au point des drones adaptés à la surveillance de ses équipements ferroviaires.
– Vous-même, quand avez-vous rejoint l’ONERA ?
En 1989, il y a un peu plus d’un quart de siècle ! J’ai été pendant dix-huit ans à la DRH, sur le site de Châtillon. En 2008, j’ai manifesté le souhait de me rapprocher de l’activité scientifique. C’est ainsi que je me suis vu confier la direction du site de Palaiseau. Un vrai challenge : le site devait prendre de l’ampleur en accueillant 300 nouvelles personnes. Et ce, rappelons-le, dans un site constitué de fortifications, peu adapté, notamment à la circulation automobile. Nous avons donc lancé des travaux d’aménagement et de constructions pour accueillir au mieux les salariés de Châtillon. Une aventure passionnante. J’ai participé au chantier du nouveau bâtiment qui a débuté en 2008, année de mon arrivée sur ce poste. Ensuite, les chantiers d’aménagement, plus ou moins importants, se sont succédé. En 2009, j’avais compté, pas moins de trente chantiers avaient été lancés sur le site, dont la construction d’un autre bâtiment d’envergure destiné à accueillir notamment notre nouveau restaurant d’entreprise.
– Ce renforcement du site avait-il été décidé dans la perspective de Paris-Saclay dont on commençait à parler ou était-il justifié par des logiques internes ?
Les deux ! On parlait déjà effectivement de Paris-Saclay. Moi-même, je participais à des réunions de la Fondation de Coopération Scientifique (FCS), de Digiteo et du Triangle de la Physique, dont nous avons été un des membres fondateurs.
Les travaux répondaient par ailleurs à des besoins de relocalisation de nos effectifs et de rationalisation de nos sites. Rappelons que l’ONERA comptait (et compte encore) huit sites en France dont trois en Ile-de-France : à Meudon, Châtillon et Palaiseau, donc. Celui de Châtillon occupe encore un bâtiment construit dans les années 30, qui n’est plus guère adapté. D’autant que les partenaires industriels du secteur de l’aéronautique ont quitté la ville pour le sud-ouest de la France ou d’autres clusters. Plus de 700 personnes restent encore à transférer.
– A Palaiseau ?
Pas exclusivement. Une partie pourrait rejoindre d’autres sites.
– Aviez-vous pris la mesure des problèmes de transport et d’accessibilité dans la perspective des premiers transferts à Palaiseau ?
Oui. Nous avions dès le départ conscience de l’importance de cette problématique. Moi-même, qui suis donc arrivée en 2008, avais pu éprouver les difficultés à s’y rendre autrement qu’en voiture. Cette problématique n’a d’ailleurs pas été étrangère aux réticences d’une partie du personnel de Châtillon à l’idée de rejoindre le site de Palaiseau !
– Qu’avez-vous donc entrepris pour améliorer la situation de ce point de vue ?
Nous avons commencé par renforcer notre système de navettes, qui partent de la station Massy-Palaiseau du RER B avec des rotations le matin et en fin d’après-midi. Nous avons également mis en place une ligne de car entre Châtillon et ses environs (où plusieurs de nos salariés résidaient) et Palaiseau. Nous nous sommes cependant engagés au sein de Polvi, l’association réunissant les entreprises et établissements de recherche du Plateau de Saclay, en vue de promouvoir notamment des solutions de transports mutualisés.
En marge, nous avons mutualisé une ligne de car avec EDF, le CEA et Télécom Paris Tech. Je dis « en marge », parce qu’EDF Lab Paris-Saclay n’est pas membre de Polvi. L’esprit de la démarche n’en reste pas moins le même. Et EDF a la même problématique que nous : l’entreprise possède un site à Fontenay-aux-Roses, situé près de notre centre de Châtillon.
– Je ne résiste pas cependant à l’envie de témoigner du fait qu’on peut se rendre à pied sur le site de Palaiseau, depuis la station Palaiseau-Villebon de la ligne du RER B, en empruntant un joli chemin. Il faut juste endurer 300 m de dénivellation…
(Sourire) Oui, les salariés connaissent bien ce chemin et beaucoup l’empruntent d’ailleurs, tous les jours. Ironie de l’histoire : des personnes qui étaient venues de Châtillon avec, disons-le, des réticences du fait de la problématique transport, m’ont confié combien elles avaient pris goût à ce petit quart d’heure de marche au milieu de la nature. Cela étant dit, je me suis quand même demandé comment convaincre les autres salariés de Châtillon à venir à Palaiseau – un transfert n’est pas une expérience toujours évidente même quand, en l’occurrence, il ne porte que sur une quinzaine de km à vol d’oiseau.
– Et à quelle conclusion en êtes-vous venue ?
A faire du site de Palaiseau un « laboratoire à la campagne » où les salariés se sentent bien. Concrètement, nous avons aménagé des douches pour leur permettre une pratique sportive, des espaces détentes avec des canapés pour qu’ils puissent échanger autour d’un café. Une terrasse jouxte par ailleurs la cantine de façon à pouvoir profiter du beau temps pour déjeuner dehors. Sans compter la possibilité de se promener dans les alentours, à pied ou en vélo. Autant de choses qui peuvent paraître modestes – elles sont d’ailleurs peu coûteuses à mettre en place -, mais qui n’en contribuent pas moins à améliorer la qualité de vie au travail. Reconnaissons aussi que l’environnement est déjà en lui-même remarquable. Le simple fait de pouvoir voir toute cette verdure depuis la fenêtre de mon bureau, je le vis comme luxe (il est vrai que j’habite à Paris).
– Avez-vous des retours positifs de vos aménagements ?
Oui. Manifestement, le personnel a plaisir à travailler ici. Le dernier bâtiment a contribué à améliorer encore plus l’environnement de travail. Il est tout en transparence et particulièrement bien éclairé. Rien à voir avec les locaux de Châtillon ! Il donne de surcroît une image plus valorisante du site..
– Est-ce cette problématique du bien-être au travail qui vous a amenée à rejoindre le WAWlab et à participer à ses séminaires (c’est d’ailleurs à l’occasion du dernier que nous nous sommes rencontrés) ?
Oui, c’est tout à fait cela. Je l’ai rejoint dès le premier séminaire organisé à Polytechnique, l’an passé, en juillet 2015. Comme les autres membres, je suis soucieuse de créer des conditions favorables aux rencontres entre les salariés. Ici, nos chercheurs sont répartis entre une vingtaine de bâtiments. Les possibilités de se croiser sont limitées, d’autant plus qu’ils sont enclins à rester dans leur laboratoire. De là, tout l’intérêt des différents aménagements que j’évoquais tout à l’heure.
– En plus de contribuer au bien-être au travail, ne sont-ils pas imposés par les conditions de l’innovation ?
Si, bien sûr. Comme on le sait, les idées naissent souvent de rencontres fortuites. De là aussi l’installation de tableaux blancs dans les espaces détentes. Je souhaiterais en mettre dans tous les lieux de passage et locaux de travail pour permettre aux chercheurs qui se croisent d’échanger plus facilement.
– En évoquant cela, pensez-vous à cette notion de sérendipité, qui a fait florès dans le champ de la recherche et de l’innovation ?
(Sourire). Oui, même si je ne saurais vous donner un exemple concret de découverte ou d’invention auxquelles des rencontres fortuites entre des salariés ont pu donner lieu !
– Mais qu’engagez-vous en vue de votre insertion dans l’écosystème Paris-Saclay ?
Comme je l’ai dit, l’ONERA est membre fondateur de l’Université Paris-Saclay et membre de Polvi. Nous associer à d’autres acteurs de Paris-Saclay est essentiel. Nous sommes d’autant plus audibles auprès des pouvoirs publics ou des collectivités locales. Polvi est reconnu comme un interlocuteur de la Société du Grand Paris et du Stif sur les questions de transport par exemple. Nous avons un contact direct avec le Préfet et les collectivités. C’est particulièrement précieux pour aborder des questions de sécurité alors que les chantiers se succèdent sur le Plateau de Saclay. Le moindre problème peut être réglé plus rapidement.
– En quoi l’écosystème de Paris-Saclay contribue-t-il au développement de l’ONERA ?
L’ONERA est un centre de recherche appliquée et a donc toujours travaillé en coopération avec des industriels (de l’aéronautique ou d’autres secteurs : outre la SNCF, nous venons de conclure un accord de coopération avec Safran, qui vient de s’installer sur le Plateau de Saclay), mais aussi avec les PME. Nous travaillons aussi en lien avec des organismes de recherche, des grandes écoles et des universités. Une réalité que la dynamique de Paris-Saclay ne fait que renforcer.
– Comment parvenez-vous à mutualiser avec les acteurs de votre environnement, tout en étant dans d’anciennes fortifications ?
(Rire) De fait, l’ONERA est resté longtemps isolé. Mais le site s’ouvre de plus en plus. Certes, l’accès est contrôlé, mais les mesures de sécurité ne sont pas plus draconiennes que pour le CEA ou Polytechnique. On peut être dans une enceinte fortifiée, se livrer à des activités secret Défense à certains endroits, tout en étant ouvert à d’autres.
– Comment appréhendez-vous cette open innovation, qui prête parfois à contresens…
En effet, ce n’est pas une innovation ouverte à tous les vents. Elle repose sur une contractualisation qui définit le champ où s’exerce des clauses de confidentialité. En ce sens, on peut dire que l’ONERA en a toujours fait. Nous avons depuis le début des accords de coopération avec des industriels.
Encore une fois, même si l’ONERA est sous la tutelle du ministère de la Défense, nous ne travaillons pas exclusivement pour lui. D’autant moins que des recherches autour d’un produit dédié à la Défense, peuvent déboucher sur des applications civiles. Par exemple, nos recherches sur la détection de mouvement ont trouvé des prolongements dans des projets en cours visant à améliorer la surveillance médicale des personnes en maisons de retraite.
Rappelons aussi que la recherche appliquée implique, tout comme la recherche fondamentale, la participation à des colloques et à des publications dans des revues scientifiques. Autant d’occasions de s’ouvrir à d’autres équipes de recherche.
– Comment appréhendez-vous l’émergence de ces acteurs relativement nouveaux au regard de l’ONERA, que sont les start-up ?
Nous travaillons déjà depuis plusieurs années avec des entreprises innovantes et donnons même naissance à des spin-off. Je pense en particulier à Protip Medical qui a développé en première mondiale un larynx artificiel issu d’une innovation ONERA : le titane poreux. Ou encore Blue Industry et Science qui a bénéficié de nos transferts de technologie sur des analyseurs de gaz.
– Le fait de vous baptiser « The French Aerospace Lab » est-il une manière de vous rapprocher du champ de l’innovation ?
Cette appellation remonte à plus longtemps que vous pouvez le penser. Je crois même que nous avons été parmi les premiers en France à l’adopter. Pour mémoire, l’ONERA est l’acronyme d’Office national d’études et de recherches aérospatiales, une appellation difficile, autant le reconnaître, à « vendre » à l’international ! Or, il importait que le sens de nos activités soit bien saisi par nos partenaires potentiels. De là, le choix du « Lab » qui a l’intérêt d’être compréhensible de tout anglophone.
– Comment percevez-vous l’évolution de Paris-Saclay ?
De manière positive. Elle justifie notre présence, ici, à Palaiseau, en nous offrant d’autres opportunités de coopération. Notre projet de regrouper nos effectifs franciliens s’en trouve plus que jamais conforté. Naturellement, nous ne pourrons pas les accueillir tous ici même. Nous nous sommes donc engagés avec l’X et l’ENSTA ParisTech, dans le projet de mutualisation d’un bâtiment qui abritera un laboratoire commun de mécanique. Lequel devrait voir le jour dans les prochaines années et concerner un nombre important de nos propres chercheurs. Le rapprochement avec d’autres acteurs se manifeste également par la participation de plusieurs de nos chercheurs à des enseignements à l’ENSTA ParisTech ou à l’X.
– Où on les imagine se rendre à pied…
(Rire). Oui, en effet, l’ENSTA ParisTech n’étant qu’à quelques centaines de mètres de là.
– Tout comme le siège d’Opticsvalley, situé face à la station Palaiseau-Villebon de la ligne B du RER…
Oui. Une proximité d’autant plus heureuse que l’ONERA a, comme je l’ai dit, investi, depuis déjà longtemps le domaine de l’optique.
– Cette année, l’ONERA fête ses 70 ans. Que prévoyez-vous à l’occasion de cet anniversaire ?
La célébration de nos 70 ans se déroulera sur deux jours, les 17 et 18 septembre pour le site de Palaiseau. Au programme : des visites de laboratoires et une exposition spécialement conçue à cette occasion, qui donnera à voir et à comprendre la contribution de l’ONERA dans quelques-unes des plus grandes réussites de l’aéronautique et du spatial ainsi que son savoir-faire pour préparer le futur.
Plusieurs de nos salariés sont musiciens. A donc également été prévu un spectacle « art et science » : ces salariés proposeront des intermèdes musicaux entre des présentations de travaux de recherche sur un format adapté au grand public
Mais nous souhaitons saisir aussi l’occasion de cet anniversaire pour, à la fois, fédérer en interne et manifester notre ouverture sur l’extérieur, y compris les riverains, de façon à bousculer cette image d’un centre de recherche replié dans ses fortifications. C’est d’autant plus important qu’un nouveau quartier a vu le jour à proximité immédiate, le quartier Camille Claudel. Avoir un centre de recherche près de chez soi peut en effet susciter de légitimes interrogations quant à savoir ce qu’on y fait exactement. D’autant plus que, dans notre cas, nous pouvons occasionner quelques nuisances, certes sans conséquences, mais des nuisances tout de même, en termes de bruit ou de fumée. Il faut donc expliquer pour rassurer.
Les 17-18 septembre correspondant aux Journées européennes du patrimoine, ce sera donc l’occasion de faire visiter le site à ceux qui le souhaitent. Nos riverains pourront ainsi constater que l’ONERA a plus que respecté le patrimoine historique du site. Hormis quelques tronçons qui ont dû être démolis pour les besoins de construction du dernier bâtiment, le réseau de galeries a été préservé. Si une partie a été aménagée pour accueillir des équipements, le reste est encore en l’état.
D’ores et déjà, des initiatives ont été lancées en vue de mieux nous faire connaître des riverains, quelque chose à laquelle je tiens, comme vous l’aurez compris. Chaque année, l’ONERA participe à une course à pied Polytechnique-ONERA-Palaiseau, qui, comme son nom l’indique, traverse le site. Cette année, cette course se déroulera le dimanche 18, en matinée.
Autant d’initiatives destinées à manifester notre présence, à montrer que notre centre de recherche offre un cadre de travail agréable et mènent des recherches de pointe, en étant tout sauf isolé…
– Un message à l’attention des 500 autres salariés qu’il vous faut encore convaincre de quitter Châtillon ?
(Rire). En réalité, je songeais encore aux riverains, qui font tout autant partie de l’écosystème que nos salariés, chercheurs et ingénieurs. Les conditions de recherche ont changé. Et, naturellement, la présence de l’ONERA n’est plus tant justifiée par le besoin de mener des recherches à l’écart de la population pour des raisons de sécurité, que par la dynamique Paris-Saclay et un cadre de vie propice à attirer des chercheurs.
– Et des capacités de logement à travers notamment ce quartier Camille Claudel, qui illustre au passage que les chantiers de Paris-Saclay ne concernent pas que des équipements de recherche ou d’enseignement, mais aussi de quoi loger les nouvelles populations…
Oui. Le logement est un autre enjeu majeur pour un centre de recherche comme le nôtre. Il faut bien que notre personnel puisse se loger. Déjà, certains ont fait le choix de s’installer dans ce nouveau quartier. Nous discutons avec la mairie pour finaliser un cheminement, qui permettrait, de s’y rendre, mais aussi d’accéder plus facilement à la station de bus la plus proche.
– Une illustration supplémentaire, au passage, de la manière dont un centre de recherche créé sur décision de l’Etat s’impose aujourd’hui comme un acteur de l’aménagement du territoire…
C’est effectivement le cas. Je précise d’ailleurs que ce même cheminement permettrait aux riverains d’accéder plus facilement à la forêt domaniale, mais également à nos salariés d’accéder au « marché des causeuses », qui se tient désormais dans le quartier Camille Claudel. Une illustration cette fois de la manière dont un centre de recherche peut faire vivre le commerce local, car nul doute que des salariés y feront plus facilement leurs courses entre midi et deux ou au sortir du travail. C’est d’ailleurs déjà le cas.
– Nous nous garderons de divulguer tout ce qu’il y a dans le bureau où vous nous accueillez. En revanche, nous ne résistons pas à l’envie de vous demander quelle interprétation faire de la présence de cette sculpture figurant le professeur Tournesol ?
(Rire) Il se trouve qu’une de mes tantes habite en Afrique. Chaque année, elle revient en France, avec des cadeaux. La première fois, c’était cette pièce figurant Tintin dans un sous-marin, une référence à Tintin et le Trésor de Rackham le Rouge. Un clin d’œil aussi au fait qu’à l’époque, l’ONERA poursuivait des recherches autour de la propulsion sous-marine. C’est l’année suivante, et à ma demande, qu’elle m’a rapporté ce Professeur Tournesol. Depuis, la collection s’est, comme vous pouvez le constater, enrichie d’une fusée, puis d’un autre Professeur Tournesol, mais en tenue de cosmonaute. N’en tirez aucune conclusion hâtive quant à ma vision de la recherche, si ce n’est que c’est un univers où on travaille avec beaucoup de sérieux, mais sans se prendre trop au sérieux.
Légendes des photos illustrant cet article : Bénédicte Fighiera, dans la grue d’un des chantiers, en 2010 ; l’activité « drones » de l’ONERA, prise dans la chambre anéchoïque du site ; l’ONERA, vu du ciel et intégré dans son quartier Camille Claudel (dans le carrousel de la page d’accueil ; photo prise de l’avion décollant d’Orly, par S. Wolf, ingénieur à l’ONERA).
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