Malheureusement, cette année, nous n’avons pu assister à l’édition TEDx Saclay. Mais nous étions présent à la rencontre organisée la veille en l’honneur des partenaires et des i-Connecteurs. L’occasion de revoir Pierre Eyraud (3e du premier rang, en partant de gauche), que nous avions interviewé du temps où il était directeur du Novotel de Saclay. Il a depuis pris la direction du Novotel Saint Quentin Golf National, dans la perspective de la Ryder Cup, qu’il a pu vivre de près, en accueillant l’équipe américaine ! Témoignage.
– Avant de vous entendre sur la nouvelle édition TEDx Saclay, un mot tout de même sur la Ryder Cup aux premières loges de laquelle vous avez été…
Oui, et pour cause : en plus d’être en proximité immédiate des greens du Golf National, nous avons accueilli l’équipe américaine dans la journée. Pourquoi elle plutôt que l’équipe européenne me direz vous ? Les deux équipes étaient logées au Trianon Palace, mais pour les besoins de la restauration, leurs capitaines avaient le choix entre notre hôtel ou les espaces du Golf National. J’ignore qui a décidé du choix final, toujours est-il que nous avons donc hérité de l’équipe américaine et sa quinzaine de stars mondiales…
– Dont le fameux Tiger Woods ?
Dont le fameux Tiger Woods et les onze autres joueurs, des légendes vivantes eux aussi, sans oublier l’emblématique capitaine, Jim Furyk, qui avait particulièrement bien préparé le séjour de son équipe, et ses deux vice-capitaines, Matt Kuchar et Zach Johnson.
– De quoi mettre la pression sur le manager de l’hôtel que vous êtes…
De quoi surtout procurer du bonheur au golfeur que je suis, par ailleurs (en plus de pratiquer la voile ainsi que je l’indiquais dans notre précédent entretien). Vivre une huitaine de jours durant, dans une relative intimité avec autant de stars mondiales est une chance qu’il faut savoir saisir car je doute qu’elle se présentera de nouveau…
– Mais comment vit-on au milieu de tant de « stars » dont on devine le niveau d’exigence ?
Bien, d’autant plus que l’hôtel était pour eux la seule base de repli, où ils pouvaient se soustraire à la pression du public et des médias. Ils y venaient donc dans l’esprit de se détendre. Et puis, nous, nous mettions un point d’honneur à être à leur service ! Au point d’avoir pris soin de nous informer de leur préférence en termes de fruits, de légumes ou de plats, et ce, avant même leur arrivée.
– Comment vous y êtes-vous pris pour en avoir connaissance ?
Nous nous en étions renseignés auprès de l’Augusta National Golf Club, un lieu bien connu de tous les golfeurs – c’est là que se déroule chaque année le Masters [le tournoi des Maîtres], la compétition suprême que tout joueur rêve de gagner avec l’Open britannique. Son responsable restauration a eu la gentillesse de nous communiquer les préférences des uns et des autres. Ce dont nous nous étions gardés de prévenir nos quinze stars, de sorte que quand un joueur puis un autre et ainsi de suite jusqu’au 15e eut la « surprise » de trouver des saveurs qu’il aimait, l’équipe américaine a compris qu’il ne s’agissait pas du fruit du hasard. Elle a manifestement été touchée de l’attention. Le dernier jour, chaque joueur nous est tombé dans les bras pour des accolades chaleureuses. Forcément, cela ne laisse que de bons souvenirs !
– La contrepartie, car il y en a au moins une, c’est que vous n’avez pu suivre le tournoi…
Non, effectivement. Nous n’avons pu en suivre le moindre instant. Nous étions occupés à réserver le meilleur accueil, tant et si bien que pendant une dizaine de jours (en comptant les jours qui l’ont précédé), nous avons dû dormir en tout et pour tout que quatre-six heures par nuit… Nous commencions très tôt et finissions très tard avec cependant le sentiment de vivre un rêve éveillé. Je tiens d’ailleurs à rendre hommage à mes propres équipes…
– Un mot sur les travaux de rénovation qui ont été consentis. L’hôtel ne ressemble plus guère à ce qu’il était avant votre arrivée…
Reconnaissons qu’il avait accusé le poids des années. Un important effort de rénovation a donc été consenti aussi bien en interne, avec le réaménagement des espaces, qu’en externe avec un relookage des façades. Les travaux auront été conduits sur deux exercices, en 2017 et 2018. Naturellement, il était hors de question de prendre le moindre retard. Il n’y en eut aucun. Le résultat est plus que positif si j’en juge par le retour de nos clients.
– Comment vous êtes-vous retrouvé à vivre cette aventure ? Aviez-vous de vous-même postulé pour diriger cet hôtel ?
Non. C’est une opportunité qui s’est présentée peu de temps après le premier entretien que je vous avais accordé, et que j’ai acceptée. En plus de connaître l’univers du golf, j’avais l’expérience d’événements de dimension mondiale (le 50e anniversaire du débarquement, que j’ai vécu au Novotel de Caen) et des réceptions officielles. Naturellement, je n’ai aucun regret. Participer à la rénovation d’un hôtel puis en manager les équipes à l’occasion d’un événement comme la Ryder Cup sont des aventures humaines enthousiasmantes en plus d’être enrichissantes. Au risque de vous surprendre, il n’y eut pas place pour le stress. C’est préférable si vous voulez réserver le meilleur accueil à vos hôtes.
– L’entretien se déroule la veille de TEDx Saclay, à l’occasion de la soirée dédiée aux partenaires et i-Connecteurs. Certes, il ne s’agit pas d’un événement aussi important que la Ryder Cup, mais tout de même…
(Rire) Il s’inscrit dans le cadre de Paris-Saclay et bénéficie donc à ce titre d’une portée mondiale. Pour autant, je ne le vis pas non plus comme une pression, mais au contraire comme une chance, celle de pouvoir contribuer à un projet que je trouve enthousiasmant. TEDx Saclay, c’est l’opportunité de découvrir des projets innovants à même de transformer le monde, sinon des domaines de connaissances et de savoirs.
– Et qu’est-ce que cela vous fait-il de renouer avec lui ?
« Renouer », dites-vous. En réalité, je n’ai jamais tout à fait quitté TEDx Saclay. J’avais d’ailleurs assisté à l’édition passée, qui se déroulait alors à CentraleSupélec. C’est d’ailleurs à cette occasion que j’eus l’heureuse surprise d’apprendre, dans la bouche même d’Assya, au moment où elle clôturait la soirée, que la prochaine édition se déroulerait au théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines. Je me souviens d’être allé aussitôt dire à Christian, que, dans ces conditions, la soirée des partenaires ne pouvait se dérouler qu’ici ! Je trouve intéressant que la tradition – car cela commence à en devenir une – se poursuive, de surcroît à cheval sur les deux départements concernés par l’OIN Paris-Saclay. A priori, un hôtel comme le nôtre a vocation à être un lieu d’échanges, de rencontres… C’est dire s’il est l’endroit idéal pour accueillir une soirée qui a la même ambition : faire rencontrer des hommes et des femmes par delà leurs disciplines et, bien sûr, leurs appartenances partisanes. [Il s’interrompt puis reprend]. En fait, je me rends compte à quel point j’ai de la chance ! Comme j’aime à le dire à mes collègues qui dirigent d’autres établissements, j’ai les clients parmi les plus intelligents de France ! De fait, tant du côté du Saclay que de Saint-Quentin, ce sont pour beaucoup d’entre eux des chercheurs, des experts ou des entrepreneurs innovants.
– Un mot encore sur le thème de cette édition (« Data Bang, l’innovation au service du vivant »). Dans quelle mesure entre-t-il en résonance avec vos propres problématiques touchant au digital ?
Nos métiers ont fortement évolué ces toutes dernières années. Si l’hôtellerie-restauration traditionnelle fait encore référence au regard des standards d’accueil et de qualité de service, nous avons désormais besoin de supports digitaux pour établir notre stratégie tarifaire et d’occupation. Nos clients sont également demandeurs de technologies embarquées. Ils en ont eux-mêmes besoin pour leur activité professionnelle, mais aussi leurs loisirs. En chaque homme ou femme d’affaires se cache un touriste potentiel et vice versa : les besoins restent finalement les mêmes, au plan digital du moins. Plus un hôtel est digitalisé pour les besoins de ses clients d’affaires, plus il peut donc prétendre les convaincre d’y venir aussi pour leurs loisirs, de surcroît en famille. Tout simplement parce que leurs enfants ne conçoivent pas non plus de ne pas disposer des meilleurs outils de connexion.
– En rappelant que les standards d’accueil et de qualité de service de l’hôtellerie-restauration traditionnelle restent d’actualité, faut-il comprendre que le mérite du digital serait aussi de révéler en creux ce qui lui serait irréductible, à savoir justement des compétences proprement humaines ?
Oui, absolument. Plus il y a de digital, plus il y a besoin d’humain. Nos hôtels seront donc d’autant plus appréciés qu’ils sauront répondre, en plus aux besoins de connexion, à des besoins de quiétude et de ressourcement. Autrement dit, s’ils permettront à leurs clients de recharger leur batterie, fut-ce pour affronter de plus belle un quotidien de plus en plus numérisé. Nos clients ne disent d’ailleurs pas autre chose : ils viennent ici pour se détendre tout en souhaitant rester connectés, ne serait-ce que pour pouvoir réagir en cas d’urgence ou de nécessité. Chez nous, c’est possible !
– Vous me faites penser à la notion d’ « oasis de décélération » définie par le sociologue Hartmut Rosa…
« Oasis de décélération » ? La formule est heureuse.
– Cela étant dit, à travers votre témoignage sur votre rapport au digital, n’êtes-vous pas en train d’esquisser une conférence TEDx Saclay ?
(Rire) Non, je n’aurai pas cette prétention ! Je m’estime déjà suffisamment heureux de participer à l’aventure à travers la soirée que nous venons d’accueillir, de m’enrichir des talents rencontrés et des conférences de demain auxquelles je compte bien assister !
A lire aussi l’entretien avec Assya et Christian Van Gysel, réalisé trois jours après le TEDx Saclay (mise en ligne à venir) et le premier accordé par Pierre Eyraud, cliquer ici.
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