Suite de nos échos à l’édition 2020 du Forum 503 de la Filière Innovation-Entrepreneurs (FIE) de l’Institut d’Optique à travers le témoignage d’Ambroise, de Vitória Maria, de Yixuan et de Nicolas, élèves ingénieurs de 1re année*, qui portent le projet Cycle Light. Lequel vise notamment à faire respecter les distances de sécurité entre automobilistes, d’une part, cyclistes et usagers de trottinettes, d’autre part.
– Si vous deviez pitcher votre projet ?
Ambroise Boyer : Nous sommes partis d’un constat : la distance de sécurité entre les automobilistes, d’une part, les cyclistes et autres usagers de modes doux de circulation (les trottinettes), d’autre part, n’est pas toujours respectée, loin de là. Un sondage en ligne, que nous avons réalisé auprès d’un échantillon représentatif de 250 personnes, le confirmait encore. De là notre idée initiale de concevoir un dispositif consistant à produire des lignes lumineuses, de type laser. Récemment, nous avons pivoté, en considérant qu’il serait bien de projeter sur le sol, à l’arrière du vélo ou de la trottinette, un message pour prévenir les conducteurs d’un éventuel danger (un message du genre « prière de ralentir », «… de reculer ») ou fournir une information à caractère publicitaire (comme les coordonnées de la plateforme de location du vélo ou de la trottinette, pour inciter les conducteurs à y recourir).
– Puisque votre équipe compte deux ressortissantes étrangères, une Brésilienne et une Chinoise, je me risque à poser la question : est-ce une solution qui vous paraît adaptée à n’importe quel contexte, européen, sud-américain, asiatique ?
Vitória Maria Carneiro Mathias : Oui ! D’ailleurs, le questionnaire évoqué par Ambroise a été adressé en trois langues : en français, en chinois et en portugais. Nous avons pu ainsi constater que notre solution répondait à un vrai besoin sur d’autres continents que l’Europe. Nous-mêmes nous sommes d’ailleurs très vite accordés sur l’intérêt de travailler sur ce sujet. Personnellement, en tant que Brésilienne, il me touche particulièrement : car, dans mon pays, les pistes cyclables ne sont pas aussi développées qu’en Europe.
Yixuan Zhan : En Chine, la situation n’est guère différente de ce que je peux constater en France : le cycliste ou l’usager de trottinette n’y est pas plus respecté. Des solutions techniques existent, mais elles ne sont pas encore satisfaisantes. La piste que nous voulons creuser, une solution à base de laser, est prometteuse et peut tout autant intéresser les Chinois que les Français.
– En dehors de l’optique, quels sont les autres champs de compétences que vous comptez investir ?
Ambroise Boyer : Nous comptons mobiliser nos compétences en électronique, pour répondre ne serait-ce qu’aux problématiques d’alimentation énergétique (un laser consomme a priori beaucoup d’énergie). Nous sommes déjà en contact avec la Chaire ELS, présente au 503. D’ores et déjà, celle-ci a aussi attiré notre attention sur les risques de distraction, provoqués par les informations projetées sur le sol : nous exposons l’automobiliste à être moins attentif à son environnement. Nous poursuivons donc nos réflexions sur cette problématique, sans exclure de renoncer à une solution tout laser.
– Vous êtes-vous tournés vers les travaux en sciences humaines et sociales, portant sur les comportements des individus se déplaçant sur la voirie ?
Ambroise Boyer : Oui, et nous en tirons une autre hypothèse : même si des lignes de sécurité sont facilement franchissables, il n’en reste pas moins que lorsqu’un parcours est balisé, la majorité des gens s’y conforment. Ce qui nous fait dire qu’ils réserveraient une bonne réponse aux informations fournies par notre solution.
– Dans quelle mesure l’écosystème de Paris-Saclay sert-il votre projet ?
Vitória Maria Carneiro Mathias : Nous avons tous eu l’occasion de le découvrir l’an passé, au cours de notre première année à l’Institut d’Optique. Etant maintenant à Bordeaux, comme Zhan, nous mobilisons aussi des ressources de ce côté-là. Nous comptons notamment nous approcher des sociétés de location de vélos et de trottinettes présentes dans cette ville.
Ambroise Boyer : Je précise que c’est Shéhérazade Azouigui, la maîtresse de stage de Vitória Maria, qui nous a introduits auprès de la Chaire ELS que j’évoquais tout à l’heure. Autrement dit, c’est par le truchement du « réseau bordelais » que nous avons pu bénéficier de précieuses compétences au sein de notre propre écosystème !
– Quel enjeu représente le Forum 503 pour vous ?
Nicolas de Rosa : Il nous offre l’opportunité de nous exercer à présenter le projet à des personnes extérieures, qui ont tout à en découvrir, de surcroît sur la base d’un poster scientifique dont la réalisation nous a obligés à synthétiser notre réflexion, à la manière d’un pitch. Jusqu’à présent, nous en étions réduits à le faire oralement, aux interlocuteurs sollicités pour le faire mûrir. Nous bénéficions ainsi de retours et de conseils supplémentaires, notamment quant à d’éventuelles personnes à contacter pour avancer dans le développement de notre projet.
– Comment envisagez-vous la suite ? Avec l’idée de traduire votre idée dans un projet entrepreneurial ?
Ambroise Boyer : Dans les semaines à venir, notre objectif est d’abord de construire une maquette, qui nous servira de support pour entamer des discussions avec les loueurs de vélos et/ou de trottinettes. Une fois que nous aurons la confirmation de l’intérêt de clients potentiels, nous pourrons ensuite passer à la réalisation d’un prototype. Nous exploiterons pour cela les ressources mises à disposition par le FabLab du Centre Entrepreneuriat 503. L’objectif suivant sera de participer à des concours, à commencer par celui de la Sécurité routière. Au cas où nous en serions lauréats, nous pourrions alors songer à commercialiser notre dispositif en en fabriquant une première série, ce qui exigera de passer par la création d’une société.
– Une commercialisation en France, mais aussi au Brésil et en Chine ?
Vitória Maria Carneiro Mathias : Oui, bien sûr. Car comme je l’ai dit, au Brésil, les pistes cyclables sont peu développées. Nul doute, donc, que mon pays pourrait être un des premiers marchés à prospecter.
Yixuan Zhang : Je crains que ce soit plus difficile en Chine. La concurrence y est telle, qu’il faut pouvoir être en mesure de proposer un dispositif très bon marché. Cela étant dit, nous avons encore du temps pour y réfléchir !
* Hormis l’un d’eux, Nicolas, qui a pu entamer la FIE dès sa première année d’études à l’Institut d’Optique.
A lire aussi l’entretien avec David-Olivier Bouchez et Pierre Mauriac, respectivement coordinateur national de la Filière Innovation-Entrepreneurs (FIE) de l’Institut d’Optique (pour y accéder, cliquer ici).
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