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CooPAttitude ou comment mutualiser les données en toute sécurité

Le 29 juillet 2014

Suite de nos découvertes des start-up d’IncubAlliance avec Claire Beninger dont la création de la start-up CooPAttitude prend sa source dans les préoccupations… d’une mère pour ses enfants.

Avant de s’aventurer dans la création de start-up, Claire Beninger a eu une riche expérience dans l’édition de logiciels et de progiciels. « Pendant près d’une vingtaine d’années, j’ai travaillé auprès d’éditeurs et d’intégrateurs sur des solutions adaptées à la comptabilité et la gestion intégrée » C’est dire si elle a acquis une bonne connaissance fonctionnelle et organisationnelle de l’entreprise. En 2011, elle rejoint une première start-up tournée vers un autre domaine d’activité : la fiabilisation des données relatives à l’identité, sur internet. A l’origine de cet intérêt pour la protection des personnes, il y a les préoccupations naturelles… d’une jeune maman. « J’avais des jumeaux de huit ans, qui, à cet âge, commençaient à utiliser ma tablette pour y chater avec leurs copains. » Naturellement, elle a le souci de veiller à ce qu’ils ne surfent pas n’importe où sur le net.

Sécuriser les données, protéger les personnes

Au sein de cette start-up, elle rencontre un informaticien, François Bachelot, qui se trouve être père, lui aussi, de jumeaux, presque du même âge. Lui et elle se découvrent des sujets de préoccupation communs. « Nous avons commencé par refaire le monde en imaginant l’internet de demain. » Pour autant, ils n’entendent pas s’investir uniquement dans le numérique. En tant que parents d’élèves, l’un et l’autre s’impliquent dans la vie associative de leurs quartiers respectifs, pour sensibiliser d’autres parents à l’enjeu, et trouver des solutions. Claire fait profiter de ses compétences en informatique en commençant par créer une page Facebook. « Je trouvais cet outil parfaitement adapté pour faire vivre l’association ». « Mais, ajoute-t-elle, force est de constater que les solutions numériques laissaient encore peu de choix. Il n’y avait que deux univers possibles : l’un ouvert, dans lequel on prend le risque de s’exposer au su et au vu du plus grand nombre (celui des Facebook et autres Twitter), l’autre plus sécurisé et propice à une démarche collaborative, mais verrouillé ». Si elle se dit adepte du premier, elle déplore qu’il ait été développé sans réelle prise en compte des enjeux de sécurité pour les personnes elles-mêmes. « Nous avons été plus sensibles à la sécurisation des données qu’à la protection de ces dernières. Certains réseaux sociaux engagent seulement la responsabilité des individus, comme Facebook. D’autres tablent sur une responsabilité collective. » Une option que Claire juge préférable, moyennant cependant plus de mutualisation entre les membres.

Pour un réseau social ouvert et sécurisé

Devant ce constat, l’idée commence à lui trotter dans la tête de proposer une solution intermédiaire : plus ouverte tout en étant plus sûre. Au cours de l’année 2012, avec son comparse, elle prend son bâton de pèlerin pour aller à la rencontre d’associations ou fédérations (Familles de France, Fondation de France…) pour tester leurs hypothèses et voir comment ces organisations s’y prenaient elles-mêmes pour fédérer leurs membres et leur permettre de communiquer en toute sécurité. « Force était de constater qu’elles n’avaient pas de politique claire en matière de sécurisation des échanges ni de protection des personnes. » Toutes étaient pourtant conscientes du changement de contexte, lié à la baisse des subventions et de la nécessité pour elles de mutualiser davantage avec d’autres associations et/ou fédérations, en privilégiant en conséquence une organisation plus transverse que hiérarchique. Avec leurs interlocuteurs, Claire et François commencent à rédiger un premier cahier des charges, jetant les bases d’une nouvelle architecture de leur plateforme d’échanges. « Au-delà de la sécurisation des données, il s’agissait de distinguer les catégories d’interlocuteurs selon le niveau d’accès aux informations auquel ils avaient droit.» L’architecture proposée est conçue en suivant un principe de « privacy by design », lequel explique encore Claire « permet de replacer les personnes au cœur de la conception du système. Jusqu’alors, les logiciels et autres frameworks ont été conçus pour les besoins d’une exploitation purement commerciale des données. A contrario notre plateforme vise l’optimisation et la mutualisation des événements ainsi que l’échange d’information entre les membres.»

Créer sa propre start-up

Parallèlement, le besoin de créer sa propre société se fait sentir. « En tant que salariée, je me surprenais à manifester de plus en plus d’incompréhension devant les décisions ou l’absence de décisions de mes supérieurs. J’ai fini par me dire que je n’étais pas forcément moins intelligente qu’eux. » Elle se prend donc à rêver de créer une start-up. Un rêve ancien en réalité. « J’y pensais depuis l’âge de vingt ans ! » Et en connaissance de cause : « Je n’ignorais pas combien créer une entreprise, c’est compliqué. Il faut donc un peu d’insouciance. Personnellement, je ne me sentais pas encore les épaules suffisamment larges pour y aller seule. Je rappelle que je suis mère de jeunes enfants. » La rencontre avec François, son futur associé, aura donc été décisive. « Nous partagions la même vision. Et puis nous nous sommes dit qu’à deux, nous y arriverions plus facilement. » « Des deux, reconnaît-elle cependant, c’est lui le Geek ! »

Une naissance à Paris-Saclay

Il reste que ni l’un ni l’autre n’avaient les compétences pour constituer et gérer une société. « Nous avions un concept, mais cela ne suffisait pas. » De là l’idée d’approcher un incubateur, dont Claire connaissait le principe. Pourquoi le choix final s’est-il porté sur IncubAlliance ? « Il se trouve que j’habite sur le Plateau de Saclay ! Surtout, sa présence au sein du cluster de Paris-Saclay constituait un avantage indéniable : il nous offrait un terrain d’expérimentation parfaitement adapté. »

L’entreprise n’a encore que quelques mois d’existence : sa création est intervenue en septembre 2013. « Nous avons mis à profit cette année 2013 pour travailler sur de l’étude fonctionnelle, la rédaction de cahier de charges, le développement de l’infrastructure et des premiers services. » Ils ont également pris le temps de rencontrer des acteurs du territoire dont Inria Saclay Il-de-France. Pour l’année 2014, l’objectif est de faire la preuve du concept pour mieux ensuite, au cours de l’année 2015, solliciter des investisseurs. « Pour l’heure, nous en sommes encore au stade de la R&D, mais nous disposons d’un peu plus q’un prototype : nous travaillons déjà avec des clients potentiels. » En guise d’illustration de l’apport concret du concept, Claire prend l’exemple d’… IncubAlliance, qui a accepté de faire partie des sites pilotes (ce dont témoigne la photo illustrant cet article). « Cette structure a notamment pour vocation d’accompagner des entrepreneurs, de différentes promotions, recrutés par un comité de sélection. Notre idée a été de proposer une approche communautaire dans la gestion des sessions en rapprochant par ailleurs les incubés actuels des anciens. » La start-up, envisage d’intégrer l’incubateur de l’Ecole Centrale, de l’IOGS et de travailler avec des collectivités locales, dont la CAPS ou des parcs d’activité comme celui de Courtabœuf. A chaque fois, la valeur ajoutée est la même : mieux mutualiser les informations en identifiant qui fait quoi. A chaque projet, cependant, sa solution adaptée. « Nous nous appuyons sur la règle du 80-20 : les besoins des clients sont à 80% les mêmes, le reste relève de besoins spécifiques, qui appellent une solution adaptée. » Au final, sa société aurait-elle pu voir le jour ailleurs ? « Oui, dans la mesure où les problématiques de la sécurisation des données et de la protection des personnes sont universelles. » Mais, ajoute-t-elle « peu de territoire nous auraient offert un tel terrain de jeu : de très nombreux acteurs opèrent à Paris-Saclay. » Le fait d’être une start-up du cru est un plus. « Même à l’heure des technologies, cela compte pour instaurer l’indispensable relation de confiance. » Un vrai terrain de jeu, donc et néanmoins complexe. « Voire compliqué » juge-t-elle. Explication : « Pour un porteur de projet, l’identification des interlocuteurs n’est pas simple. » Des progrès restent encore à faire en matière de mutualisation. « Pour un même événement, je peux recevoir plusieurs invitations, chaque partenaire communiquant dans son coin. Pourquoi ne pas mutualiser ? L’impact de l’événement serait d’autant plus fort. » A bon entendeur… De la mutualisation à la coopération, il n’y a qu’un pas que Claire franchit d’autant plus volontiers que cette notion a inspiré le nom de sa start-up, CooPAttitude.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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