L’engagement associatif, cela maintient la jeunesse. Illustration, avec Gérard Delattre, 74 ans [au moment de cet entretien réalisé en juin 2012] dont plus de la moitié consacrée à des associations, la plupart liées au territoire du Plateau de Saclay.
C’est en 1970 que l’histoire de Gérard Delattre avec le Plateau de Saclay débute. Cette année-là, cet ingénieur en électricité, natif du Nord, s’installe avec son épouse à Jouy-en-Josas. « Au sortir du service militaire, j’étais en quête d’un emploi et, déjà, l’Ile-de-France, était la région la plus attractive.» Deux ans plus tard, il fait construire une maison à Vauhallan, où il vit encore.
Contre une urbanisation complète du Plateau
C’est dans ce village que son engagement associatif prend naissance. « Rien que de très banal : comme d’autres, je voulais défendre ce qu’on appelait alors le cadre de vie. » Il crée donc « Vivre à Vauhallan » (VIVA), toujours en activité, mais dont il a depuis abandonné les rênes. Au milieu des années 80, il participe à la création d’un collectif dont les préoccupations vont bien au-delà du cadre de vie de sa commune. Nous sommes en 1986. Suite à la fermeture de l’aérodrome de Guyancourt, l’école d’hélicoptères qui se trouvait à proximité doit être transférée. « Tant qu’elle était au milieu des terres, elle ne gênait personne. Seulement, il fut question de la transférer sur un terrain du domaine public, situé entre Saclay et… Vauhallan.» Le collectif du Plateau de Saclay voit le jour. Il obtiendra l’abandon du projet.
Le collectif ne se dissout pas pour autant. « Dans le droit fil du plan de Delouvrier qui prévoyait une extension de la ville de Saint-Quentin jusqu’à Palaiseau, le Plateau était sous la menace d’une urbanisation à marche forcée. Notre collectif veillait à l’éviter.» En 1987, Gérard Delattre est appelé à présider l’association des Amis de la Vallée de la Bièvre (AVB), constituée vingt ans plus tôt en décembre 1967. Il y restera treize ans. « L’année de mon départ, en 2000, nous avons obtenu le classement de la vallée, au titre des sites protégés.»
En 1988, l’élaboration d’un schéma directeur est à l’origine d’un autre engagement associatif. A la demande express du Préfet, ce schéma censé s’imposer ensuite aux POS, devait être élaboré par les communes elles-mêmes. « Par la voix du Préfet, l’Etat plaçait les élus devant une alternative on ne peut plus claire : ou bien, ils parvenaient à élaborer ce schéma, dans l’intérêt général, tout en prenant en compte les besoins des établissements existants, ou bien l’Etat reprenait la main.» Le message a été manifestement entendu : les collectivités locales, emmenées par le maire d’alors de Gif-sur-Yvette, se lancent ensemble dans l’élaboration d’un schéma en impliquant les représentants d’associations. Pour y prendre sa part, le collectif constitué contre le projet de transfert a été transformé en Union des Associations de Sauvegarde du Plateau de Saclay (UASPS) dont Gérard Delattre assume la présidence.
L’élaboration s’échelonnera sur quatre années. « De façon démocratique, reconnaît-il. Les associations étaient invitées à participer aux commissions de travail.» Leur volonté de voir maintenu un espace rural est entendue. « A l’époque on ne parlait “ que ” de 2 000 ha, le schéma portait il est vrai sur un périmètre un peu plus restreint que celui de l’OIN actuelle.»
A l’occasion de l’élaboration du schéma, Gérard Delattre et ses amis découvrent l’existence d’un livre blanc commandé en 1975 (soit l’année de l’implantation de l’Ecole Polytechnique) par le premier ministre de l’époque, un certain Jacques Chirac. Rédigé par un comité scientifique présidé par André Blanc-Lapierre, le directeur de Supélec de l’époque, ce rapport rendait compte de la manière dont les établissements scientifiques déjà implantés sur le Plateau voyaient l’avenir du Plateau de Saclay. « Contrairement au schéma Delouvrier, qui prévoyait l’urbanisation de l’ensemble du Plateau dans le prolongement de Saint-Quentin, ce schéma marqua un premier coup d’arrêt en prévoyant le maintien d’un espace rural.»
L’expérience de la coconstruction
De son engagement dans l’UASPS, Gérard Delattre retient l’expérience d’un travail de co-construction avec les collectivités. « Cela a toujours été ma ligne de conduite : dialoguer, plutôt que d’être dans une opposition systématique, sans exclure la possibilité de défendre avec fermeté des positions qui nous tiennent à cœur ! ».
Adopté en 1992, le nouveau schéma directeur sera repris dans le schéma directeur d’Ile-de-France de 1994. « Dans son intégralité, à quelques modifications près ». Seulement, ce schéma ne s’appuyait sur aucune structure administrative à même de le porter et de le financer… Un district (ancêtre des communautés) fut bien constitué, mais il ne fit pas long feu. Pour Gérard Delattre, le Plateau souffrait et souffre encore de la frontière départementale. «Cela complique grandement les choses ! ». Exit donc le schéma qui sera finalement abrogé par la toute nouvelle Communauté d’agglomération du Plateau de Saclay (CAPS) constituée en 2003. Durant plusieurs années, des projets sont donc menés, mais en l’absence de toute vision globale.
Une nouvelle étape intervient cependant en 2006, avec la mission de préfiguration de l’OIN, à l’initiative du premier ministre de l’époque, Dominique de Villepin. Entre-temps, Gérard Delattre déjà en retraite professionnelle s’était résolu à prendre sa retraite associative, en mettant à profit sa disponibilité pour voyager en Afrique, avec son épouse.
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